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Full text of "Le conservateur du sang humain ou la saignée démontrée"

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L E 

CONSERVATEUR 

D U 

SANG HUMAIN, 

O U 

LA SAIGNÉE DÉMONTRÉE 

Toujours pernicieufe & fouvent mortelle. 
Par M. de Ma LO N. 


Salus populi fuprema lex. 

Que le bien public foit votre première loi. CLc 5- 



A PARIS, 

Chez Antoine Boudet, Imprimeur 
du Roi, rue S. Jacques. 


M DCC. LXVI. 

Avec Approbation , & Privilège die Roi. 



AVANT PROPOS. 

I L faut être bien convain¬ 
cu de ia vérité de ce que 
l’on avance * pour ofer atta¬ 
quer une pratique ancienne¬ 
ment établie & généralement 
foutenue , au moment enco¬ 
re où elle femble dans fa 
plus grande vigueur ; c eft ce 
que je fais aujourd'hui, en 
travaillant à faire rayer la 
faignée du catalogue des re- 
rnedes. Rentre dans les plus 
grands détails fur cette ma¬ 
tière, je donne une défini^ 
tion du fang &: de fes prin¬ 
cipes , je développe les ref- 
forts de la digeftionje prou¬ 
ve que nos maladies font 
toujours dans nos humeurs 



iv AVANT-PROPOS, 

8c jamais dans le fang qus 
neftque leur extrait 3 je fais 
voir combien la faignée efl: 
contraire à la coâdon 8c à la 
diflolution radicale des ali- 
mens pour former un bon 
chyle 5 jappuyé mon rat¬ 
ionnement d'exemples frap- 
pans j ôc de comparai fons 
toutes Amples. 

Si je parviens à prouver 
que la jaignée la plus jage- 
ment ordonnée efl toujours per- 
nicieufe & fouvent mortelle 9 
quelque bien qu elle femblefaP 
re , le public y gagnera beau¬ 
coup : fi l’on ne trouve pas 
mes rai fons fuffifantes, j’au¬ 
rai fait voir au moins mon 
envie d’être utile. 



CONSERVATEUR 

D JJ , 

SANG HUMAIN 


i. 

La Saignée ejl toujours préjudi¬ 
ciable > quelque bien quelle 
Jemble faire. 

E célèbreVanhelmont, 
à qui nous fommes re¬ 
devables de nos meil¬ 
leurs remedes fîmples, déplo- 
roit le fort des malades dont on 
verfoit le fang ; il difoit dans fà 
douleur » qu’un démon meut?*. 









2 Le Conservateur 
» trier s’étoit fans doute emparé 
» des chaires de la Médecine, 
» parce que le démon lèul étoit 
» capable d’infpirer le befoin 
» indifpenfable de faigner un 
» malade pour parvenir à fa gué- 
» rifon ». 

Encouragé par un fi grand 
maître» j’oie entreprendre de 
prouver que l’erreur la plus 
grande enfanta la faignée, quel- 
le ne peut continuer d’être en 
faveur malgré tout le mal quelle 
opéré» que par le change qu’on 
a pris jufqu’ici fur la vraie caufe 
des maladies. 

J’ofe dire que la faignée fit 
toujours du mal» quelque bien 
quelle ait paru faire ; je vais en¬ 
trer dans des détails qui ne le 
prouveront que trop à ceux qui. 
fe font une habitude de la fai¬ 
gnée , & qui préfèrent l’ouver¬ 
ture de leur veine à la plus, lé-, 
gere purgation. 



DU SANG HUMAIN. £ 

La feule ignorance de la na¬ 
ture du làng, de la vraie caufo 
des maladies & des remèdes qui 
leur font propres, produifit le 
grand abus de la faignée. 

2. 

Le fang fa purifie avant <$entrer 
dans les veines . 

Je demande que Ion remar¬ 
que avec la plus férieufo atten¬ 
tion que le lang, avant de s’in¬ 
troduire dans les veines & dans 
les artères, ell purifié par deux 
codions. La première & la prin¬ 
cipale caufe des maladies me fora 
donc pas dans le làng, propre¬ 
ment dit j mais foulement dans 
la forabondance & l’épaiflîfie- 
ment des humeurs qu’il charrie. 

Il faudra donc fe contenter, 
pour guérir un malade, de quel¬ 
que maladie quece puilfe être » 
Aij 



4 Le 'Conservateur 
de travailler à découvrir l’hu¬ 
meur peccante, la purifier, ou 
l’évacuer par un purgatif propre 
à en débarrafier le lang. . 

Que l’on faigne un malade 
dans la grande fermentation de 
l’humeur altérée, ce fang, juf- 
qua la derniere goutte, ne pa- 
roîtra-t-il pas toujours mauvais ? 
Semblable au vin troublé dans 
une barrique que l’on met en 
perce avant qu’il foit clair, & 
que l’on tirera trouble jufipà la 
derniere goutte. 

3 A. 

Analyfé du fang SC de fes 
■principes. 

Si nous en croyons le fyftême 
reçu & enleigné dans nos Eco¬ 
les même de Médecine, on 
trotive trois humeurs dans notre 
corps qui fe mêlent avec le fang. 



BU SANG HUMAIN. jf 

Ce font, la bile , la pituite &. 
la mélancolie. 

3 B. 

Ce que cejl que la hile. 

La bile n’eft qu’un fel amer 
fulfureux, réfolu par fon propre 
véhicule, puifque fon goût eft 
li fort, & qu elle fe développe 
dans l’eau comme le fel : l’ufage 
des chofes qui reffemblent le 
plus à là nature comme les épi¬ 
ceries , les viandes falées, les 
alimens de haut goût, mordicans 
& âcres , l’augmentent & l’en* 
flamment ; voila pourquoi dans/ 
toutes les maladies où l’on re- 
connoît de l’inflammation, on 
commence par interdire les cho¬ 
ies falées. 

La bile grofïiere s’évacue par 
les urines & par les felles, la 
lubtile a Ion liège dans la veli- 
A iij 



€ Le Conservateur 
cule ^ du fiel : fon efprit fait la 
partie la plus pure du fang. 

La bile fuperflue & gromere, 
enfin la bile noire & excrémen- 
teufe, fait toujours la fource des 
plus violentes maladies, com¬ 
me des douleurs de tête avec la 
fièvre, quand cette bile pèche 
par la quantité : elle produit l’ic¬ 
tère quand elle eft épanchée. 

( fiidtère eft ce qu’on appelle, 
aflez vulgairement jaunifïe : on 
diftingue deux fortès d’i&ères , 
le blanc & le noir ; le blanc 
s’annonce Amplement par les 
pâles couleurs, le noir s’annon¬ 
ce d’abord par une couleur jau¬ 
ne clair, enfuite d’un jaune 
plombé, livide & bazanné ). 

Quand la bile reflue & fe dé¬ 
gorge dans l’eftomac, elle y 
produit des coliques violentes : 
fi cette bile engorge les boyaux, 
elle produit les coliques bilieu- 



DU SANG HUMAIN. 7 
fes & néphrétiques, elle dégé¬ 
néré en fables 8c en pierre, 8c 
enfin caufe beaucoup d’autres 
maladies, que la faignée ne peut 
guérir, mais dont on fe délivre 
par l’évacuation de l’humeur qui 
caufè le mal» en provoquant les 
Telles êc les urines, mais jamais 
par la faignée. 

4 - 

Ce que âejl que La pituite • 

ta pituite fè forme de l’hu¬ 
mide que nous prenons avec les 
alimens ; cette humeur fè confï- 
dere encore en trois fùbftances ; 
la grofïïere, la fubtile & fon ef- 
prit. La grofïïere s’évacue par la 
veffîe : la fubtile a fon fîége au 
cerveau, 8c fon efprit entre dans 
la compofition du fang pour le 
rendre fluide. 

Quand la pituite grofïïere fur- 

A iv 



8 Le Conservateur 
abonde, elle caufe l’hydropifie; 
quand la fubtile pèche en quan¬ 
tité y elle forme les catharres, les 
fluxions, les rhumes, les rhu- 
matifmes , les paralyfies & l’a¬ 
poplexie. Cette humeur & lès 
maladies fe guérilTent en pur¬ 
geant le groffier, en conden- 
lant le fubtil? à quoi la laignée 
devient inutile. 

5 *- 

Ce que c\ejl que la mélancolie 
ou flegme. 

Nous la divilèrôns comme les 
autres en trois fubftancès : la 
groffiere, la lùbtile & Ion ef- 
prit. La groffiere a Ion liège 
dans la rate, la fubtile dans la 
grailTe, & fon elprit entre dans 
la compolition du làng. 

Lorlque la mélancolie grol- 
fiere furabonde elle groffit la 



DU SANG HUMAIN. p 
râtte 5 caufe des obftruétions en 
épaifîïiïant les fluides., les ali- 
mens grolîïers 8c vifqueux l’aug¬ 
mentent ; ainfl pour guérir les 
maladies quelle enfante, il fau¬ 
dra travailler à la rendre fluide, 
8c la laignée feroit tout le con¬ 
traire. 

Par ce détail il eft aifé de voir 
que la fàignée ne peut produire 
aucun bon eflèt dans prefque 
toutes les maladies, puifque je 
viens de prouver qu elles étoient 
plutôt enfantées par la mauvaijfè 
qualité des humeurs &leur épaif 
flflement que par toute autre cau- 
lè : d’ailleurs le fang n’étant que 
la partie la plus déliée des hu¬ 
meurs 8c la plus fpiritüeufè, ce 
fera toujours la plus pure 8c celle 
qu’il faudra conferver. 

Mais, me dira-t-on, com¬ 
ment connoître l’humeur fiira- 
bondante d’un malade Ml y a 
Av 



io Le Conservateur 
plulieurs moyens qui Indi¬ 
quent , entr autres le fiuvant, 

6 . 

Moyen de connoître thumeur 
peccante du malade. Nous al¬ 
lons l'indiquer. Domination 
du fang . 

Chaque humeur domine par¬ 
ticulièrement en telle ou telle 
partie du jour. Le fang, la par¬ 
tie la plus pure des humeurs & 
leur extrait, efl: dans là vigueur 
& fa force depuis trois heures 
après minuit julqu’à neuf heures 
du matin ; c’eft pourquoi celui 
qui fè couche & fe leve à des 
heures réglées & de bonne heu¬ 
re , trouve, en le levant matin 
& avant le jour, ou au foleil 
levant, fon efprit lefie & dif- 
pos ; il arrive même alTez ordi¬ 
nairement que ie malade fefent 



DU SANG HUMAIN. II 
mieux le matin que l’après-midi, 
parce que le fang répand alors 
par toute l’habitude du corps 
îà chaleur agréable, douce & 
vivifiante. 

7 * 

Domination de la bile. 

La bile domine depuis neuf 
heures du matin jufqu’à trois 
heures après-midi, tems auquel 
la force & la vertu naturelle fé- 
pare la bile du fang, l’envoie 
au fiel & aux autres parties où 
elle eft nécefiaire, ce qui fait 
qu’à ces heures l'homme eft plus 
facile à s’émouvoir & fe mettre 
en colere. 

8 . 

Domination de la mélancolie « 

La mélancolie fait fbn office 
depuis trois heures après-midi 
jufqua neuf heures du loir ; pen- 
A vj 



i2 Le Conservateur 
dant ce tems le foie le purge, 
jette dehors Ion écume & tou¬ 
tes les fuperfluités que la nature 
rejette du côté de la ratte ; 
c’eft pourquoi pendant cette 
intervalle l’entendement paroît 
moins libre, offufqué qu’il eft 
par une vapeur épaifle & noire, 
qui lui ôte la gayeté, & rend le 
fujet rêveur. 

9 - 

Domination de la pituite. 

La pituite ou flegme domine 
depuis neuf heures du loir ju£ 
qu’à trois heures après minuit : 
alors le flegme furabondant que 
les alimens ont produit, en¬ 
voyé des vapeurs froides & hu¬ 
mides au cerveau qui l’affàiflent 
& rendent l’homme pelant & 
endormi : cela eft li vrai que 
l’heure du lommeil paflee on 
s’endort beaucoup moins. 



BU SANG HUMAIN.. Ij? 


10. 

Nos humeurs empirent plus ou 
moins félon les faifons. 

Les élémens 5 les affres , les 
làifons, les cieux enfin ont leur 
mouvement régulier ; nos hu¬ 
meurs ont aulfi des mouvemens 
8c des périodes fixes > 8c produi- 
fent des effets bons ou mauvais > 
fuivant les failbns auxquelles ces 
mêmes humeurs ont un rapport 
plus particulier. 

1 1 . 

Empire du fang au printemps . 

; Ainfile fang domine au prin¬ 
temps > à caule de fon analogie 
avec cette faifon où tout efprit 
fermente ; auffi les fièvres de 
printemps font- elles vives 8c 
continues. 



J* Le Conservateur 

12, 

Empire de la bile en été, 

La bile domine en été , parce 
que chaude de fa nature elle a 
un rapport parfait avec la cha¬ 
leur de l’été, & c’eft le tems 
des fièvres tierces. 

* 3 - 

Empire de la pituite en hyven 

La pituite domine en hyver» 
parce qu’elle ell froide & fura- 
bonde dans le fiijet par le défaut 
de tranfpiration que caufela ri¬ 
gueur de cette fàifon ; c’eft le 
tems des fièvres quotidiennes & 
éphémères qui finirent en un 
jour, parce qu’elles font moins 
occafionnées par la corruption 
proprement dite des humeurs 
que par leur épaiffiffement & par 



DU SANG HUMAIN» If 
l’altération périodique & paffa- 
gere de la régularité de leur 
cours. 

Pour peu qu’on veuille y faire 
attention, on remarquera qu’au 
moment où chaque différente 
humeur fait fbn office ? les ac¬ 
cès des fièvres que nous venons 
d’annoncer & de diftinguer fè 
manifeflent, & que ces accès 
ceffient ou diminuent de beau¬ 
coup quand une humeur cède 
fbn empire à l’autre, pourvu 
toutefois que chacune de ces 
humeurs ne fè trouve pas fiibju- 
guée par celle qui lui fùccéde r 
car alors il fè fait une crifè, & 
l’on remarquera què cette crifè 
arrive plus particu fierement fous 
les changemens de domination. 



16 Le Conservateur 
H- 

Diflinclion de lhumeur qui caufe 
telle ou telle fièvre. 

L’on fera attention que pour 
l’ordinaire les fièvres continues, 
& toutes celles qui viennent du 
fang & de fa fermentation ex¬ 
traordinaire i ont leur accès le 
matin ; les fièvres tierces vers le 
midi ; les fièvres quartes vers les 
trois ou quatre heures * la fièvre 
quotidienne à une heure après 
minuit. 

fp 

Caufe de la fièvre continue . 

Il fera donc aifé d’infèrer que 
la fièvre continue, dont l’accès 
eft au matin, vient du fang 8c 
de fon mélange avec des hu¬ 
meurs crues qui, par. leur fer¬ 
mentation, l’embrafent & le 



DU SANG HUMAIN^ ïy 
-conlîiment, à quoi l’on remé¬ 
diera j en tâchant d’évacuer une 
partie de ces humeurs crues ou 
recuites dans les premières voies, 

1 6. 

Fièvre tierce . 

Les fièvres tierces provien¬ 
nent de la mauvaife difpofition 
de la bile ; il faudra donc la dé¬ 
layer & la purger, ce que la fai- 
gnée ne peut faire. 

l 7 • 

Fièvre quarte . 

Les fièvres quartes viendront 
du vice de la mélancolie, il s’a- 

f ira donc de trouver le moyen 
e lui rendre fa qualité fluide, 
& d’employer des remèdes qui 
la fubtilifent : eft-ce par la Ali¬ 
gnée qu’on y parviendra ? puifi 



18 Le Conservateur 
quelle détruit & évapore la par» 
tie la plus fpiritueufe, par con* 
féquent la plus propre à diflou- 
dre & digérer convenablement 
les humeurs crues. 

18. 

Fièvre quotidienne . 

La fièvre quotidienne pro¬ 
viendra du vice du flegme , il 
s’agira de diminuer ce flegme 
par le choix de certains alimens 
& la privation de quelques-uns ; 
à tout cela la laignée devient 
abfolument inutile : voila pour¬ 
tant les quatre fources de nos 
maladies. 

J’avouerai que quelquefois il 
arrive que toutes les humeurs 
par leur extrême abondance fe 
trouvent mêlées , alors elles 
n’ont plus de réglé & de tems 
limité. Leurs accès font & plus> 



DU SANG HUMAIN. 
violens & plus longs ? & par l’in¬ 
tempérie des humeurs la mala¬ 
die devient rebelle ou dange- 
reufe ; alors la maladie n eft ? 
pour ainfi dire, qu’un accès con¬ 
tinuel , parce que la corruption 
des humeurs mêlée avec le fang 
qui les charrie, fait qu’elles ne 
peuvent perdre de leur vice qu’a- 
près avoir recouvré leur , équi¬ 
libre; mais dans ce cas la fai- 
gnée fera très-contraire : car les 
efprits ayant plus d’aélion & de 
force, feront bien plus promp¬ 
tement évaporés par l’ouverture 
de la veine, ce qui peut caufer 
la mort du malade ou le rendre 
cacochyme toute là vie. 



ao Le Conservateur 

ip. 

Raiforts qui prouvent que la fai- 
gnée la plus prudemment ordon¬ 
née ejl toujours un mal 

L’habitude delà faignée abrège 
la vie de l’homme, le rend plus 
fùjet. aux maladies 3 parce qu’il 
en devient plus foible ; Galien 
même condamne le fréquent 
ufage des faignées, à caufe de la 
difïipation des efprits qui le fait 
avec l’efprit de fang, d’où réfulte 
infailliblement le refroidifle- 
ment de tout le corps, & de-là 
l’affoibliflement de toutes les 
fonctions naturelles : ceux qui. 
voyent ainfi couler leur fang 
fans réflexion ? n’en (ont pas 
toujours quittes pour la foiblefle 
du corps 5 ou les maladies de 
langueur, ils payent quelque¬ 
fois d’une mort fubite l’impru* 



DU SANG HUMAIN. 21 
dence de s’être fait faigner lé¬ 
gèrement , parce que le feu de 
la lampe s’éteint tout-à-coup , 
faute d’huile pour l’entretenir. 

20. 

'La faignêe contraire meme dans 
la pléthore. 

Une des fortes raifons que 
l’on ait crû pouvoir donner d’em¬ 
ployer la fàignée, c’eft quand il 
y a pléthore : cependant il y a 
des tempéra mens qui paroif- 
fent robuftes & pléthoriques, 
auxquels la faignée eft la plus 
pernicieufe. J’ai connu plulieurs 
perfonnes dans cédas,auxquelles 
la maniéré Ibmptueufe de vivre, 
la vie fédentaire, la couleur ani¬ 
mée du vilage, les maux de gor¬ 
ge , les péfànteurs de tête, la 
grande tenfion des veines fem- 
bloient indiquer le befoin de fai- 



s&2 Le Conservateur 
gner, & cependant, prefqu’auf 
h-tôt la faignée faite, ils tom- 
boient dans des convulfîons, fui- 
vies d’un accablement de plu- 
fieurs jours. Perfonne ne peut 
nier que la pléthore ne loit fou- 
vent occafïonnée par une indi- 
geftion : or la faignée eft mor¬ 
telle dans Pindigeftion, il n’efl 
donc pas toujours prudent de 
l’employer, même quand on 
fuppofe la pléthore, & puifqu’en 
dégageant le grand canal on 
donne du relfort à tous ceux qui 
viennent s’y rendre^ je préféré’ 
rois un lavement approprié au 
tempérament de la perfonne 
& convenable à l’état de fès hu¬ 
meurs. _ 

En fuivant la nature dans fès 
opérations, nous remarquerons 
que tout remède qui affbiblit fè 
trouve infailliblement contrat 
re,puifqu’après les crifès & les 



DU SANG HUMAIN. 23 , 
évacuations naturelles le ma¬ 
lade en devient plus fort ; en 
voici la raifon : ceft que la na¬ 
ture n’a purgé que le furabon- 
dant, au lieu que nous pur¬ 
geons fouvent avec trop d’indif¬ 
férence toutes les humeurs de 
nos malades ; de-là vient qu’a- 
près des évacuations que nous 
procurons ils font encore plus 
toibles, & que fouvent les acci- 
dens augmentent avec le danger 
de mort. 

21. 

Attention particulière de Galien 
avant de faire faigner, quoique 
ce fut un des partifans de la 
faignée . 

Galien, quoique partilàn de 
la faignée, ne laiffoit pas de pe¬ 
ler avec foin toutes les circonf 
tances avant de l’employer ; il 
s’eflapperçu, dans le traitement 



24 Le, Conservateur 
même des pléthoriques, que 
l’abftinence fuffifoit aux uns, une 
nourriture choifie & modérée 
aux autres » un léger purgatif à 
ceux-ci, un lavement à ceux-là. 

Hippocrate ne penfoit pas au¬ 
trement que Galien : car en par¬ 
courant avec foin Ion livre de la 
diète, nous verrons qu’il re¬ 
garde î’abftinence comme le fè* 
cours le plus sûr pour vuider les 
vaifTeaux. 

Frédéric Hoffman veut auffî 
qu’on recherche foigneufement 
la caufe de la furabondance du 
fang-, & li l’on découvre qu’elle 
puiüe venir de l’excès de nour¬ 
riture, il penfë qu’il y a beau¬ 
coup plus de fureté de s’en tenir 
à l’abftinence, que de recourir 
àlafàignée. 

3,2Ï 



DU SANG HUMAIN. 2 $ 

22 . 

Second cas où la faignée eft con¬ 
traire j même dans la pléthore . 

Je vois avec douleur que bien 
loin de faire toutes ces atten¬ 
tions à l’égard des pléthoriques, 
on enleve aux corps même les 
plus affaiblis, & fouvent les plus 
exténués par toutes fortes de re- 
medes,le peu d’elprit de làng 
qui leur relie pour l’entretien 
d’une flamme fouvent prête à 
s’éteindre. 

2 3 . 

La nature eft en défaut Ji rêva- 
cuation du fang eft un de Jès 
ouvrages. 

Si l’efFulion du làng pouvoit 
être un remede auffi efficace 
pour la guérifon des maladies 
que le font les autres évacua- 
B 



2.6 Le Conservateur 
tions naturelles, comme font 
les Tueurs, les vomiflemens, les 
diarrhées, &e. pourquoi la na¬ 
ture n’auroit - elle pas difpofé 
en faveur de l’évacuation du 
fang, des voies aufli détermi¬ 
nées qu’aux fluides quelle vuide 
par les pôres & les Telles, & 
puifqu’elle n’a pas fourni les 
memes indications pour la fai- 
gnée -que pour les mdorifiques 
& les purgatifs , nous ne devons 
donc pas la regarder comme 
aufli néceiïaire dans tous les cas. 
Les partifans de la faignée 
vous diront encore que ce n efl 
pas tant pour vuider les vaif- 
îèaux que pour évacuer ou cor¬ 
riger l’humeur nuifible qu’ils 
admettent la Taignée ; mais ne 
peut-on pas leur répondre que 
cette humeur efl cantonnée dans 
un lieu particulier, ou quelle efl 
également répandue dans toute 



DU sang humain, 27 
la mafTe des liqueurs f dans le 
premier cas la faignée ne peut» 
fans lui fuppofer de l’intelligen- 
ce , aller chercher le vice dans 
,1e lieu du dépôt; & dans le fé¬ 
cond » les plus amples faignées 
n évacueront pas feulement la 
^centième partie de l’humeur 
peccante » elles en empêcheront 
même la réparation. 

24. 

Principes defquels le f&ngejl 
forme. 

Raisonnons principes : le fuc 
que nous appelions fang , eft 
formé de deux matières très-dif 
férentes ; l’une confifte en la 

F raifTe la plus épuréq de la terre » 
autre eft la partie là plus aéfive 
de l’air, laquelle ayant plus de 
mouvement, fè trouve plus ca¬ 
pable d’en communiquer à tous 



sS Le Conservateur 
les corps qui s’en trouvent lùf- 
ceptibles, & cet élément que 
nous appelions air, porte dans 
tous les corps le feu qui les ani¬ 
mé) qui le trouve la caufe im¬ 
médiate de l’accroiffement & 
de la multiplication des femen- 
ces. Il eft probable que le liège 
de nos maladies doit être dans 
la partie terreftre du làng 5 & 
nullement dans la partie fpiri- 
tueufe qui lui donne la vie , par 
conféquent la faignée doit re-> 
tarder la cure des maladies) 
puilque fon effet eft de faire 
évaporer , par l’ouverture delà 
veine , la partie aâiive de l’air 
fans laquelle tout corps demeu¬ 
rerait fans mouvements & fans 
force. 



DU SANG HUMAIN." 2p 

2 5 - 

Raifons féduifantes en faveur de 
la faignée. 

Voici les raifons les plus fé¬ 
duifantes des partifàns de la fai¬ 
gnée , elles fe réduifent à qua¬ 
tre principales. 

Première raifort, 

« Quand le fàngne circule pas 
» librement il faut le diminuer >- 
» afin* de. lui donner de l’air & 
» de faciliter Ion mouvement. 

Seconde raifon . 

» Par le moyen de la faignée 
» l’on parvient à rafiraîchir le 
» fàng, quand il fè trouve échauf¬ 
fé plus qu’il ne faut. 

Troijième raifon ., 

» Une chaleur ou un mouve- 
B iij 



§‘6 LE CONSERVATEÛR. 

» ment exceflif du fang peut 
» rompre les vaifTeaux qui leçon- 
» tiennent , & alors faire tom- 
a ber le fang extravafé fur les 
» parties nobles, dans lefquels 

étant privé de fon mouvement 
» ordinaire, il contraéleroit un 
» vice de pourriture qui fèroit 
». caufe de la définition du fujet. 

Quatrième raifort . 

» Il convient de faigner les 
» gens qui fe nourrifTent d’ali- 
y> mens très-fucculens, ce qui 
* produit une grande quantité 
» de fang capable de fiiffoquer 
» ceux qui vivent de la forte, 
a> ce qui rend la faignée com- 
» me indifpenfable. 

26 . : 

Développement de là digefiion . 

Avant de répondre à ces qua¬ 
tre objétions, difbns deux mots 



DU SANG HUMAIN/ £1 
de la digeftion : je dis donc que 
l’eftomac de chaque animal » 8 c 
particulièrement de l’homme, 
eft la racine par le moyen de 
laquelle il reçoit les fubftances 
capables d’entretenir les mou- 
vemens de la machine. Les mê¬ 
mes mpuvemens que l’on remar¬ 
que dans la fouche & dans le fî- 

f uier, arrivent également dans 
animal, enforte que rien ne fe ' 
mêle avec le fang qui n’aye au¬ 
paravant pafTé de l’eftomac 
dans les boyaux, des boyaux 
dans les veines la&ées, & en- 
fuite dans les artères & autres 
veines. 

Ce qui fe pafTe dans l’animal 
eft l’image de ce qui arrive dans 
les végétaux, & même dans les 
métaux & les minéraux : à la vé¬ 
rité il arrive bien des chofès 
dans ces derniers que nous ne 
voyons que par les yeux de l’ef- 



3 * Le Conservateur 

prit ; mais les expériences ont 
confirmé nos idées à cet égard. 

27. 

Ce qiùil faut pour bien digérer. 

Deux chofos font" également 
néceïïaires dans l’animal pour 
faire la digeftion : l’une confille 
en ce qu’on appelle levain de 
feftomac, l’autre confille en les 
refforts. 

Le levain de l’ellomac fort à 
diffoudre les alimens, brifés» 
hachés & liquéfiés , ou par une 
préparation extérieure, ou par 
les refforts & la falive de la 
bouche : le diffolvant change 
leur nature & parvient à en for¬ 
mer un fuc tout-à-fait différent 
des alimens ; ce lue fo nomme 
chile, c r efl cette liqueur qui, par 
les veines laélées, entre dans le 
fang qui fo trouve poufféç par 



DU SANG HUMAIN. 
les refforts de l’eftomac & l’é- 
lafticité des conduits par où elle 
pafTe. 

Voila les deux chofes les plus 
eflentielles pour la fabrique & 
la formation du fàng 9 que l’on 
peut nommer fuc vital, puifque 
de lui dépend la vie. 

Le feu ou la chaleur natu¬ 
relle , le mouvement des parties 
voifines, aufli bien que leur 
bonne ou mauvaife conforma¬ 
tion , contribue aufli beaucoup 
à rendre la digeftion plus ou 
moins parfaite. 

Il faudra donc examiner, avec 
la plus férieufe attention, tous 
les défauts & les dérangemens 
qui peuvent arriver par la mau¬ 
vaife difpofltion des racines 3 & 
de la partie terreftre qui eft en¬ 
trée dans le fang, après quoi 
nous viendrons à l’examen de la 
partie aérienne, reçus dans les 
B v 



34 Le Conservateur. 
conduits fupérieurs nommés 
poulinons. 

Ayant donc fuffilamment re¬ 
connu que le dilTolvant deTef 
tomac & Tes relForts Ibiént les 
principaux agens de la digef- 
tion, il faudra tâcher de dmin- 
guer leurs bonnes ou mauvaifes 
dilpolîtions, & même celles des 
corps deftinés à être diflous. On 
parviendra facilement par ce 
moyen à la connoifFance des dé- 
lordres & du dérangement qui 
arrivent dans les fucs renfermés 
dans les grands tuyaux, & à y 
remédier, ce qui deviendroit 
împoffîble à celui qui n’auroit 
aucune v connoilTance de la mé¬ 
canique, Sc qui feroit de la fai- 
gnée fbn principal remedé. 

Il faudra donc ne pas perdre 
de vue ce que je viens de dire, 
que deux choies principales fer- 
voient à former le fuc que l on 



DU SANG HUMAIN. $$ 
nomme chyle, fçavoir : le le¬ 
vain de l’eftomac & les refi* 
forts, dont les fibres nerveufes 
font toute la vertu. 

28. 

La falive efl le dijfolvant de 
r ejlomac, 

Qu’eft-ce qui doute que la là- 
live fo mêle avec les alimens, 
8 c même qu’il en coule dans 
leftomac fans que nous y coo¬ 
périons , e’eft le difiblvant de 
î’eflomacy 

L’ori nomme falivé- cette H- 
queur dont la bouche effc tou¬ 
jours humeébée-, parce quelle 
abonde en fol , & que tout foi 
fondu ou dlfToufr eft- un- difTol- 
vant, ce fol fo< trouve formé des 
corps qu’il a dirons- lui-même 
c’eft une roue-continuelle; après 
quoi, par' le moyen- dufee" infî- 



Le Conservateur 
nité de glandules qui tapiflTent 
la bouche & l’eftomac, le fang 
qui Te trouve porté par les artè¬ 
res dans le corps de Ces petites 
glandes en y filtrant, fait une 
lefïive des fels les plus pénétrans 
qui fe mêlent avec les alimens 
& forment leur difTolution ; & 
afin que cette difTolution foit 
parfaite , il faut que le diflolvant 
& le corps diffout fe trouvent 
également bien difpofés. 

Or c’eft une réglé dans l’or¬ 
dre des chofes , qu’aucun difTob* 
vant n’a de force que fur un 
corps de fà nature pour le dif- 
loudre radicalement, j’entends 
par difTolution radicale faction 
d’un corps fiir un autre d’une 
maniéré douce & impercepti¬ 
ble , à la fin de laquelle le diifol* 
vant & le corps diffout ne font 
plus qu’un tout de même natu¬ 
re , quoique fous une formé dif¬ 
férente. 


mi SANG HUMAIN. 37 

Par exemple, quand on jette 
un grain de bled dans la terre, 
il y rencontre la faline de la ter¬ 
re, c’efl-à-dire, une certaine 
quantité d’eau & de lèl qui fait 
dilfoudre & pourrir ce petit 
corps y fans quoi la diffolution 
ne le feroit pas non plus que lï 
on le jettoit dans un fable fec ou 
lùr un rocher. 

De même fl je jettois ce mê¬ 
me grain de bled dans un étang, 
quoiqu’il vint à s’y corrompre 
& à y pourrir , il ne prendroit 
pas cette nouvelle apparence & 
ne pourroit végéter, parce que 
fon feu le trouvant étouffé par 
la trop grande quantité du dil- 
folvant, il n’y auroit plus de di¬ 
latation & d’accroifTememt. 

Dilons donc que ce grain de 
bled ayant été formé des fucs de 
la terre & de l’eau du ciel, il ne 
peut être radicalement diirout 



38 Le Conservateur 
Reparles mêmes matières dont 
il a été formé, & qu’ainfi il ne 
peut s’étendre, prendre figure 
de la plante, ni multiplier, fi la 
terre où l’on veut le femer n’a 
toutes les qualités que je viens 
d’annoncer. 

27. 

Aucun corps ne fe dijjbut que par 

un dïffolvant de fa nature . 

Pour prouver qu’aucun corps 
ne peut fe difioudre que par une 
humidité de là nature, que l’on 
jette une fèmence de pomme 
dans de lu cirer* quoique la cire 
foit un corps humide & huileux, 
n’étant pas- de la même nature 
de la fèmence il ne le fera au¬ 
cune dilToltition;. de même que 
fi l’on jette de l’argent dans de 
l’eau forte Sc. de l’or dans de 
leau régale, il ne le fait point 
une véritable diirolution, mais 


DU SANG HUMAIN. 59 
une fimple réparation ; parce que 
ees eaux pénétrent l’or & l’ar¬ 
gent , & les divifent fans les dif- 
foudre ; cela provient de ce que 
ees eaux ne font ni de la nature 
de l’or ni de celle de l’argent * 
auflî cette féparation fe fera-t-elle 
avec une grande effervefeence 
contre l’ordre de la nature, dans 
les difîblutions radicales qui fe 
font toutes fans violence, fans 
bruit & d’une maniéré prefque 
imperceptible , comme nous 
voyons le. fèl dans l’eau, parce 
que le fel eft de la nature de 
l’eau. 

Voila donc la différence que 
je remarque entre une eorrolion 
& une diffolution radicale ; 
quant à la. diffolution qui fe fait 
dans i’eftomacpour qu’elle 
foit parfaite, if faut quelle fe 
trouve conforme aux réglés fuf- 
dites, fans.quoi elle feroit mau- 



4 © Le Conservateur 
vailè» il ne proviendront de cette 
dilTolution qu’un mélange con¬ 
fus du difTolvant & du corps 
qui devoit être dilïout, lequel 
n’ayant point paffé par la pour¬ 
riture radicale porteroit avec foi 
une crudité ou des parties indif 
foutes 9 lelquelles venant à le mê¬ 
ler avec les lues épurés & uni¬ 
formes» troubleroient l’écono¬ 
mie & l’équilibre des liqueurs 
d’où dépend la fanté. 

Il y a une j uftefle admirable 
dans les principes qui compo- 
fent le fang, lorfque la nature 
les a fait palier par fa balancer 
La matière ignée ou cette ame, 
dont nous avons parlé, le trouve 
fi finement enveloppée par l’eau 
Sc le fel, que tous les principes 
dont le lang eft compofé , ne 
s’entrechoquent qu’autant qu’il 
le faut dans le mouvement où 
ils font » d’où dépend la vie. 


DU SANG HUMAIN. 41 
30. 

Raifons qui prouvent que toutes 
nos maladies viennent du feul 
défaut de digejliôn. 

Nous remarquerons aifément 
que tous les délordres qui arri¬ 
vent dans la machine procèdent 
du fèul défaut de digeftion» 
fource de toute maladie ; ce qui 
arrive lorfque le diffolvant de 
l’eftomac n’â pas radicalement 
diffout les alimens en ne faifànt 
que les écarter & les divifèr, 
n’agiffant en cela que comme 
l’eau régale fur l’or, & l’eau forte 
fur l’argent; de nos mauvailès 
digeltions rélulte une maffe glai* 
reufè & vifqueufe qui fouvent 
demeure au fond de l’eftomac , 
parce que les refTorts, quoique 
dans leur état naturel, n’ont pas 
la force de les pouffer dans les 
boyaux. 



4 2 Le Conservateur 

Les perfonnes fur qui cela fe 
pâlie, ièntent encore du matin 
au foir & du loir au lendemain, 
les vapeurs d’un aliment qui n’a 
point paiïe 8 c qui eft encore in- 
diffous ; que s’il arrive que pe- 
tit-à-petit il defcende dans les 
boyaux, cpmme il n’a point été 
radicalement difTout dans l’ef- 
tomac , la dilfolution ne fe fait 
qu’avec effort contre les parois 
des boyaux, ce qui trouble fi 
fort le fujet en qui cela fe paffe 
par une infinité de nerfs qui ré¬ 
pondent au cœur & au cerveau ,• 
que quand cette digeflion de¬ 
vient habituèlie, l’imagination 
fe trouve bleflee & le malade 
devient fujet à des terreurs pa- 
niques qui lui prennent fùr-tout 
la nuit, 8 c l’engagent dans des 
rêves fatiguans & affreux. 

Il arrive encore un autre in¬ 
convénient dans les perfonnes 



DU SANG HUMAIN. 
qui mangent beaucoup, & en 
qui la digeflion le fait lente¬ 
ment; cette malle d’alimens 
vilqueufc & glaireufe s’attache 
aux parois de l’eftomac 8c des 
boÿaux, empêche par-là Fac¬ 
tion du diflblvant de feftomac 
& qu’il ne le fade allez fentir 
pour exciter Fappétit ; ces mê¬ 
mes vilcolités bouchant le paf* 
fage au cours ordinaire de la 
bile , la forcent à refluer, même 
dans Feftomac , dans lequel ve¬ 
nant à le mêler avec Ion dilïbl- 
vant , il s’y fait un bouillonne¬ 
ment qui caufe des ébranlemëns 
de nerfs qui excitent des dou¬ 
leurs de tête, des naufées, des 
tendons de bas ventre, des co¬ 
liques & quelquefois des tranfi 
ports au cerveau. 

torique les parties âcres & 
corrolives de la bile viennent à 
fè développer 8c à fè raréfier * 



44 Le Conservateur 
elles fe portent plus loin, & eau* 
fent un mouvement & .une ra¬ 
pidité dans la mafTe du fang 8c. 
dans les efprits qui en dérangent 
toutes les parties 8c pour lors 
les poulmons, le foie & tout le 
refte du corps eft en feu , parce 
que la bile eft dans les animaux 
ce que le loufre 8c le bitume eft 
à la terre entière. 

3 I * 

Comparaifon de la hile en nous y 
avec le foufre dans le globe 
Mrrejlre. 

Il faut regarder la bile dans 
fon état naturel comme le fo u- 
fre dans les minières de la terre> 
fes effets font toujours bienfài- 
lans quand il ne trouve point 
un trop grand feu qui l’excite & 
l’enflamme ; il eft l’ame du glo¬ 
be terreftre : âu lieu que s’il 



DU SANG HUMAIN. 4? 
Vient à s’enflammer il s’en fé- 
pare un corrofif fi violent , 
qu’une feule goutte en mouve¬ 
ment fatigue l’odorat au point 
qu’il ne peut foutenir fbn im- 
preflion. 

Les effets de la bile dans les 
animaux font les mêmes, quand 
rien n’intercepte fbn cours, elle 
fe mêle aux alimens 8c porte la 
douceur dans toutes les parties » 
elle fait la féparation du pur 8c 
de l’impur ; s’il arrive au con¬ 
traire qu’elle fbit arrêtée 8c ren¬ 
fermée quelque part, tant par 
ion propre feu que par celui des 
parties voifines, elle fait des 
écarts 8c des explofions comme 
la poudre à canon, 8c pour lors 
les fècouffes, les feux 8c les 
flammes, enflamment 8c con- 
fument la machine. 

Des grands mangeurs qui fur- x 
chargent leur eftomac tora- 



4 6 Le Conservateur 
bent facilement dans ces acci- 
dens, de même que ceux qui 
par des alimens gras & huileux 
peu proportionnes à la nature 
du diflblvant, l’enveloppent & 
le rendent incapable d’agir, 
Les grandes pallions trou¬ 
blent aulli la digeftion, car le 
cerveau eft comme un foleil, & 
les nerfs qui s’y trouvent atta¬ 
chés font comme autant de 
rayons qui portent un feu qui 
iert à toutes les opérations du 
fujet 9 Sl d’autant que la digef 
tion eft la principale, elle eft 
rallentie lorlque ce feu lui man¬ 
que r Sc c-eft laiburce des-eru* 
dites.'' ' r ' cti _ _ 

Or dans l’ordre de la nature 
tout levain communique de iWr 
pece de Ion levain dans les 
corps auxquels il fè mêle , ces 
matières venant à entrer. & à 
pâlïèr par leurs conduits ordi- 


DU SANG HUMAIN. 47 
naires, nondeulement troublent 
le fan g , mais encore elles l’ai- 
griflent, ce qui fait que par un 
poids confidérable de ces matiè¬ 
res la nature eft tout d’un coup 
accablée , & qu’on fe font rom¬ 
pu & brifé.. 

. Cet état provient de la réiîf- 
tance & de l’effort que les e£ 
prits font quand le coagul com¬ 
mence, & que répaiffiffement 
arrive dans ces liqueurs. 

Beaucoup de Médecins ne 
font aucune réflexion à cette e£ 
pece de maladie, ils la mépri¬ 
rent dans là naiffance ; mais 
voyant arriver en&ite des acci- 
dens confidérables, ils difonten 
eux-mêmes que cette malignité 
ne leur étoit point connue. 

Quand les matières qui s’in- 
troduifont dans la mafle du lang 
font fuffifamment cuites & di¬ 
gérées, elles ne forment aucun 



48 Le Conservateur 
dérangement, parce que fl Ton 
confulte les réglés de la nature, 
on verra que les corps de même 
efpece s’entrepénétrent aifément 
& prefque fans qu’on s’en ap« 
perçoive, comme nous l’avons 
fait remarquer du &1&. de l’eau. 

Je vais ajouter trois expérien¬ 
ces à celles que j’ai déjà citées. 

52. 

Trois expériences qui prouvent 
que tanalogie des corps eft né' 
cejjaire à leur mélange parfaiû 

Prenez de l’huile de vitriol, 
féparez-en le flegme, remettez* 
le dans la même huile, il n’arri¬ 
vera aucune efFervelcence, par¬ 
ce que cette eau a été tirée de 
fon corps de la même nature 
dont elle eft elle-même, & quoi¬ 
que vous en verliez beaucoup il 
ne fe paflera rien de violent ; 

mais 


©U SANS HUMAIN.' 0 
friais fi vous prenez de telle au¬ 
tre eau ou liqueur qu’il vous 
plaira, même diftillée, elle pro¬ 
duira une fi grande chaleur que 
vous ne pourrez tenir la main 
tranquillement fur le vafè qui 
contient ce mélange» 

Voici une fécondé expérience. 

Prenez du foufre commun, 
verfez defTus telle eau ou tel 
difïbivant falin qu’il vous plai¬ 
ra , comme l’eau forte, l’efprit- 
de-vin, le vinaigre, l’eau pure 
ou l’huile de vitriol , aucun n’y 
mordra ; mais fi vous le mettez 
non-feulement dans des huiles 
& des bitumes terreftres, mais 
même dans des huiles ordinai¬ 
res , il s’y mêlera comme l’huile 
commune & la cire. 

Voici une troifiéme expé¬ 
rience. 

Prenez de l’or en limaille fine, 
mêlez-le promptement avec du 



5© Le Conservateur 
mercure échauffé, ils fe péné¬ 
treront fi bien , & fe lieront fi 
intimement, qu’ils fembleront 
n’être qu’un même corps, 5 c 
cela d’une maniéré douce & im¬ 
perceptible ; mais fi vous le mê¬ 
lez avec de l’eau régale il en 
fortira une fumée d’une odeur 
infupportable, accompagnée de 
bruit & dé bouillonnement } 
parce que for n’eft ni de,fana? 
ture dé l’urine , ni.du.fàlpêtre, ni 
du fel marin dont l’eau régate 
efl compofée, mais bien de celle 
du mercure que les Phiiofophes 
ont appelle l’eau de l’or, . 

33 , -V' 

Réponfes à quâtre objections fé- 
duifantes en faveur de la Jd 'i¬ 
gnée. 

Mais je vais répondre au^qua* 
tre féduifantes objections : qui 


DU SANG HUMAIN. JÎ 
m’ont été faites, & que je vais 
rapporter encore pour la com¬ 
modité du le&eur. 

i°. Quand le fang ne circule 
pas librement il faut le diminuer , 
afin de lui donner de £air f SC fa* 
ciliter fon mouvement . 

Je réponds à cette première 
objeéfcion, qu’après les expérien¬ 
ces que je viens de donner , on 
peut voir que la circulation fe 
trouve gênée par la qualité des 
alimens infuffifamment difîous, 

Î >arce qu’ils n etoient point ana- 
ogues au tempérament du 
malade & à la matière difTol- 
vante qui fe trouvoit dans fon 
eliomac : ainfi je juge qu’un 
lavement convenable feroit plus 
efficace, parce qu’en dégageant 
les premières voies il donneroit 
fùffifemment d’air à tous les ca¬ 
naux qui s’y rendent. 

2°. La faignée rajfraichit le 

ci i 


$2 Le Conservateur 
fang qui ejl échauffé plus quilné 
faut. 

Je réponds que la faignée, en 
détruifant une portion de la 
chaleur vitale, femble raffraî- 
chir ; mais on peut donner à fon 
calme le nom de refroidifïe* 
ment : en effet nous voyons fou- 
vent que, trois ou quatre heures 
après ion opération, la fièvre de¬ 
vient encore plus forte, quoi¬ 
que le malade foit infiniment 
plus foible : une liqueur béni¬ 
gne , capable de précipiter les 
mauvais levains qui caufent la 
fermentation de la bile, me pa- 
roîtroit infiniment plus conve¬ 
nable. 

3 Une chaleur ou un mouve¬ 
ment excefjîfdu fang , peut rompre 
les valffeaux qui le contiennent , 
par-ïa faire tomber le fang extra- 
vafé fur quelque partie noble , 
dans laquelle venant cl pourrir , il 


DU SANG HUMAIN.' 
feroit câuje de la dejlruclion du 
fujet. 

Cette chaleur exceffîve du 
làng ayant pour principe le peu 
d’analogie des humeurs dont il 
eft l’extrait, il eft clair qu’un la- 
vement donné à propos rafraî¬ 
chira davantage qu’une laignée ; 
d’ailleurs il dilpolè à la lueur 
qui contribue beaucoup à déga¬ 
ger le malade, un vomitif doux 
pourroit auflî convenir dans 
cette occalion. 

4. 0 . Les hommes qui mangent 
beaucoup SC Je nourrirent dali¬ 
ment très-fucculens, forment une 
quantité de fang capable de les 
fujjoquer , par conféquent la fai- 
gnée ejl le feul remede conve¬ 
nable. 

Je réponds au contraire que 
par conséquent c’eft le remede 
le plus dangereux, puilqu’il eft 
mortel dans l’indigeftion, & 
C iij 


$4 Le Conservateur 
que tous ces grands mangeurs 
font , prefque chaque jour de leur 
vie , dans le cas d’indigeflion : 
des vomitifs, des lavemens & 
des cordiaux enfuite, me pa« 
roilfent beaucoup plus efficaces, 
& nont rien de dangereux. 

34 * 

Preuves de t inutilité de la 
Jaignée . 

Ce qui m’a toujours fait en¬ 
trevoir l’opération de la faignée 
comme la plus inutile, le voici : 
j’ai remarqué que la nature fai- 
foit toutes fes opérations en dif- 
folvant & en coagulant ; le 
mauvais levain qui s’introduit 
dans la malle du fang pour le 
vicier, eft donc coagulant ou 
fondant ; or quand un levain 
fùpérieur en a changé, ou tra¬ 
vaille à en changer un autre ên 



DU SANG HUMAIN. Jf 
fa nature* il eft impoflible qu’en 
diminuant ou retranchant une 
partie du corps qui! pénétre, 
on puiffe empêcher ce change¬ 
ment ; mais on pourroit y par¬ 
venir en introduifant un autre 
levain fupérieur à celui qui pro¬ 
duisit un mauvais effet, parce 
qu’il donneroit un mouvement 
convenable au fùjet, 8c capable 
de lui rendre là circulation na¬ 
turelle. . . .. 

En effet quand la faignée fa¬ 
ciliter oit une plus libre entrée à 
l’air dans la maffe du lang, 8c 
que par cet air introduit elle y 
exciteroit un plus grand mou¬ 
vement > Ion adbion fe termine- 
roit toujours félon la loi du plus 
fort. 

L’expérience le prouve fur 
les gens empoifonnés par des 
odeurs ou des vapeurs malignes, 
ou enfin de mauvais fucs qui 
C iv 


5 $ Le Conservateur 
peuvent s engendrer chez nous, 
& produire les mêmes effets, 
auxquels cas la fàignée eft mor¬ 
telle. 

La raifbn de cette expérience 
eft fènfible, on donne lieu par 
l’ouverture de la veine, à une 
déperdition d’efprits & du feu 
qui fervoit à combattre ces cor¬ 
pulentes malins, & pou voit, par 
une cuite douce & modérée, 
ou par des circulations réité¬ 
rées , leur faire changer de qua¬ 
lité, ou les évacuer par les voies 
marquées par la nature pour la 
féparation du pur & de l’impur. 

Voila l’effet naturel de la fài¬ 
gnée, & non ce prétendu raf- 
fraîchiffement ni cette liberté 
de circulation par le fecours de 
l’introduâion de l’air. 

On ne manquera pas de dire 
qu’on voit tous les jours des ma¬ 
lades guérir par la laignée; mais 



DU SANG HUMAIN. 
un homme ne peut-il pas rece¬ 
voir dix coups d’épée & en re¬ 
venir ? ne peut-il pas avoir des 
hémorragies & n’y pas fuccom- 
ber ? Croit-on qu’il ne feroit pas 
poflible de guérir un homme 
de la fièvre après lui avoir coupé 
les deux oreilles ? S’enfuivra-t-ii 
qu’il faudra commencer par les 
couper avant tout autre remede, 
à tous ceux qui fe trouveront 
dans le cas d’avoir la fièvre ? 

D’ailleurs je demande où font 
les réglés qui vous indiquent la 
quantité de fang qu’il faut tirer 
à un malade ? Eft-ce , comme 
dit Galien dans un endroit de 
fes œuvres alTez connu 9 jufqu’à 
ce que le fujet tombe en défail¬ 
lance Ion en tireroit donc bien 
peu à ceux que la feule piquure 
fait trouver mal. Eft-ce par le 
coloris? Eft-ce par la confiftan^ 
ce du lang, ou parce qu’il coule 
Cv 


*8 Le Conservateur 
bien ? Mais les variations & le 
peu de folidité qu’on remarque 
en tout cela dans la pratique de 
ce remede , nous font voir le con¬ 
traire. 

Mais , dira-t-on, quel remede 
plus paillant dans les maladies 
des femmes ? Qu’on s’en infor¬ 
me dans les Couvens de Reli- 

f ieufes, c’eft le remede qui leur 
onne le plus prompt foulage- 
ment ; ne voit-on pas la nécefïïté 
indilpenfable de faigner dans 
l’elquinancie & les fluxions de 
poitrine? Voila fans doute les 
colonnes de la faignée, & le 
Médecin qui tue fon malade 
dans l’un de ces cas, ou dans tous 



BU SANG HUMAIN. ’ 

3T* 

La faignée réjettée dans les 
fluxions de poitrine. 

Je dirai donc que ce qui fait 
la fluxion de poitrine eit une 
matière encore contenue dans 
lgs vaifleaux,ou extravafée fi. 
elle eft contenue dans les vaifi- 
feaux, le même gonflement & 
la même preflîon qui- le fait aux 
poumons, fie feroit aufli aux ta¬ 
lons fl les poumons y étoient 
placés» & dans ce cas faignez 
ou ne faignez pas > tant que le 
fang eft contenu dans fies y aies » 
la nature a mille moyens de Ce 
débarrafler de ce qui l’agite : 
cette maladie n’a befoin que de 
régime 8c point du tout de re- 
mede. 

Mais la difficulté roule feule¬ 
ment fur ce que les matières Ce 
C vj 


6 o Le Conservateur 
trouvent extravafées dans la 
poitrine : examinons comment 
par la faignée on peut leur faire 
reprendre les voies par lefquel- 
les elles s’étoient échappées. Je 
dis donc que le mouvement de 
la matière extravafée eft plus 
grand que celui de la matière 
encore contenue dans les vaif- 
feaux , ou qu'il eft moindre. S’il 
eft plus grand , mal-à-propos fai- 
gnez-vous; parce que la matière » 
par cette fupériorité d’action 8c 
de mouvement, peut rentrer 
dans ion lit ou s’échapper à tra¬ 
vers les pôres en forme de lueur 
ou de vapeur, moment fi déliré 
dans ces fortes de maladies. 

Mais comme la difficulté ne 
eonfîfte qu’en ce que la matière 
extravafée a perdu de fon mou¬ 
vement, quand la caufe de la 
maladie feroit dans la mafle du 
fang r comment la faignée pour- 


DU SANG HUMAIN. 6f 
roit-elle la détruire ? Car ou la 
faignée augmente le mouve¬ 
ment du fang, ou elle le dimi¬ 
nue; fi elle le diminue , ces 
matières déjà congelées s epaifi 
liront encore, par- là feront 
moins en état de rentrer dans 
la mafle du fang ou de trànfpi- 
rer par les pôres. 

Si, au contraire, la faignée 
augmente le mouvement des 
liqueurs contenues dans les vei¬ 
nes & dans les artères, l’effort 
de celle-ci étant fupérieur à l’au¬ 
tre, l’empêchera de reprendre 
la voie pa» où elle s’eft échappée. 

36. 

La faignée contraire dans la 
plénitude. 

Difons encore quelque chofè 
fur la fauffe idée de quelques- 
uns , que la faignée eft mdifpen- 



6 z Le Conservateur 
fable dans la plénitude. 

Remarquons avec attentiori 
que la plénitude procède de fucs 
cuits & digérés, ou bien de fucs 
cruds & imparfaits ; fi elle pro-* 
cède de fucs cuits, leur mélange 
au fang n’y portera nul dérange*? 
ment, parce que, comme je lai 
démontré, les corps de même 
nature fe pénétrent facilement : 
que fi la machine fe trouve fur- 
chargée de ce foc, des laveraenâ 
& la diète feront bien fuffifans ; 
j ôterai donc à ce malade une 
portion de fa nourriture & non 
pas des palettes de fàng , voilà 
le vrai remede à ces fortes de 
plénitudes : en faignant on ôte 
le feu de la nature , on/la prive 
par là des moyens de fe purifier 
elle-même. 

Il y à une autre plénitude qui 
fe fait & procède de matières 
indigeftes, celles-ci produifènÊ 


DU SANG HUMAIN. '6% 
Ordinairement les dérangemens 
& le mouvement périodique' du 
fa ng qu’on appelle fièvre : fi , 
comme on a lieu de le croire , 
la caufe de Ces fièvres eft dans 
Feftomac Sù dans les boyaux , 
par des crudités retenues qui 
fermentent & bouillonnent, 
fermentation qui fait qu’une 
goutte de matière raréfiée oc* 
eupe la place de plufieurs, & 
forme une tenfion confidérable 
contre les parois des boyaux ; 
plus vous Alignerez en cette oc- 
eafion, plus vous facilitez l’en¬ 
trée à ces matières dans la malle 
du fang., de même qu’à l’air ; 
par ce moyen l’efièrvefcence y 
fera plus grande, 8c loin de 
calmer fon mouvement & fon 
feu, d’empêcher la rupture des 
vaifTeaux & l’épanchement du 
fang, vous donnez lieu à tous 
ces délbrdres ; puifque ces cru* 


#4 Le Conservateur 
dites font les mêmes écarts dans 
le fàng que le bois verd dans un 
grand feu. 

Pour prouver de plus en plus 
que la faignée eft contraire dans 
ces fortes de plénitudes? puis¬ 
qu'elle donne lieu aux crudités 
de s’infinuer dans la mafle du 
fang, je veux que Ton fafle at¬ 
tention qu’une liqueur qui fè 
meût, & qui fè trouve étroite* 
ment renfermée, fe gliffe tou¬ 
jours du côté le plus foible *. aufS 
voyons-nous qu’après une fai¬ 
gnée , dans pareil cas, quoi¬ 
qu’un moment après il paroifFe 
un peu de calme par la difïïpa- 
tion des efprits, peu de tems 
après les matières redoublant 
leurs efforts, prouvent bien que 
ce calme n’étoit qu’apparent , 
& l’air qui vient de prendre la 
place du fàng qu’on a tiré, étant 
compofé de parties plus flexir? 


DU SANG HUMAIN. 
blés j réiiflera moins aux crudi¬ 
tés qui fermentent j & fe gliffe- 
ront fans peine dans les veines 
par les mêmes conduits qui por¬ 
tent le chyle ou fuc nourricier. 
Au lieu que li lon avoit laide le 
4àng dans les veines 9 fes parties 
par leur effort lupérieur fe fè- 
roient oppofées au paffage des 
fucs indigeftes. 

37. 

On Jemble faire de la faignée 
un remede univerfeL 

On fe moque des gens qui 
prétendent avoir un même re¬ 
mede pour toutes les maladies , 
& cependant l’on ordonne la 
faignée dans tous les cas, quelle 
extravagance ! 

On ell fi généralement pré¬ 
venu que toutes les maladies 
proviennent de chaleur > qu’on 


66 Le Conservateur 
ne fauroit propofer aucun ré4 
mede chaud à un malade dans 
la fièvre, quand même il de-, 
vroit donner le calme à la ma¬ 
chine ; ridée des malades eft fi 
fort échauffée là-deffus , que s’il 
arrive qu’ils en ayent pris quel- 
ques-uns, quoiqu’il leur: Ibit là- 
lutaire, & qu’ils reviennent en 
fanté, fans avoir paffé par ces 
milieux cruels où le malade, par 
foibleffes & fes indigeflions, 
fouffre mille fois plus que dans 
le principe de fa maladie ; s’il 
arrive enfin qu’il retombe fix 
mois ou un an après, ce malade 
n’en voudra point entendre par¬ 
ler j & nulle raifon ne le rappel¬ 
lera , prévenu qu’il eft par un 
Médecin jaloux qui lui a fait un 
monftre de ce remede; cepen¬ 
dant il eft des remedes échauf- 
fans qui raffraîchifTent dans cer¬ 
tains cas 3 & j’ai remarqué que 


DU SANG HUMAIN. Cj 
le foufre en poudre donné à la 
dofe d’un gros ou deux dans un 
véhicule convenable pendant 
deux ou trois jours , étoit un 
grand fpécifique pour la fièvre. 

38. 

Echauffans qui raffraichijfenu 

On parvient à rafïraîchir un 
jeune homme de vingt-cinq ans 
par lufage de lefprit de fel, de 
îoufre & de vitriol , qui forme- 
roient une eau forte vigoureufe, 
& qui font des remedes de feu. 

Un vieillard, qui la plupart 
du tems n’eft échauffé que par 
la fermentation des crudités de 
fon eftomac, retrouve le cal¬ 
me de fon fang dans lufage des 
aromates, du bon vin vieux 
avec du focre, dans les alimens 
de bon fuc, parce que ces cru¬ 
dités fe trouvent éteintes par la 


68 Le Conservateur 
maturité fupérieure des alimens > 
capables de leur donner ce qui 
leur manquoit pour arriver à 
une digeftion parfaite. 

Voila donc le cas de pouvoir 
annoncer qu’un Médecin pru-* 
dent qui connoît fon malade^ 
peut employer des échauffans 
qui raffraîchilTent. 

D’après ces railonnemens, 
que l’on employé la faignée, le 
petit lait & l’eau pannée dans 
toutes fortes de maladies indif¬ 
féremment, ma confolation fera 
d’avoir rempli mes devoirs en¬ 
vers le public, en lui découvrant 
une erreur qui lui efl préjudicia¬ 
ble , & lui épargnant une opé¬ 
ration qui n’eft que trop fouvent 
irréparable. 



DU SANG HUMAIN. 6ÿ 
39 - 

La faignée contraire dans les 
maladies habituelles . 

Par exemple, dans les mala¬ 
dies habituelles, à quoi la fai¬ 
gnée peut-elle être bonne ? Car 
enfin dans les maladies habi¬ 
tuelles, les liqueurs ont fi fort 
changé de nature, qu’il efl: im- 
poflible, quand même la lài- 
gnée feroit de plus grands chan- 
gemens qu’elle n’eft accoutu¬ 
mée d’en faire , qu’elle pût en 
produire un afiez prompt pour 
rétablir le fang 8c lès elprits dans 
leur premier état. L’arbre de 
trente ans ne s’arrache pas avec 
la même facilité que celui d’un 
mois : aux maladies habituelles 
il faudra donc des remedes ha¬ 
bituels, car outre le défordre 
des liqueurs, les organes ont 



7© Le Conservateur 
fouffert de fi fâcheufes impref- 
fions, que les remedes les plus 
fpécifiques perdent leur aâion | 
en travaillant à la deftru&ion 
de l’humeur, ce défordre nuit 
fouvent à l’état des malades, & 
empêche le bien qu’ils pour» 
roient refFentir du bon effet & 
du changement que ces reme¬ 
des lèroient dans le cas de pro* 
duire. 

Voila ce qui met le plus grand 
©bftacle à la guérifon des mala¬ 
dies habituelles ou chroniques, 
dans lefquelles des Chirurgiens 
ignorans ou des Médecins peu 
habiles ordonnent la faignée 
comme par précaution; cela 
n arrive que trop chaque jour. 

40; 

La vie eji dans le fang. 

On ne doute nullement que 


DU SANG HUMAIN. 7I 
la vie ne Toit dans le fang, que 
cette liqueur néceïïaire au mou¬ 
vement de là machine, ne puiiTe 
être diminuée fans quon affoi- 
blifle fôn principe, & qu’on 
n’emporte en mêmé-tems quel¬ 
que portion précieufe de cet hu¬ 
mide radical né avec nous, qui 
efl l’huile de notre lampe & le 
baume qui nous fait vivre ; 
baume qui n’a pourtant qu’une 
certaine étendue d’où dépend 
le nombre de nos jours : il eft 
donc impoflible de rencontrer 
une vieilleffe heureule dans un 
lùjet que l’on aura louvent 
faigné. 

4 1 * 

La faignee contraire dans 
topprejjion . 

On faigne communément 
pour les difficultés de relpirer, 
je ^oudrois cependant qu’qn. 



72 Le Conservateur 
examinât, avec attention, qué 
fouvent cette difficulté de ref- 
pirer & loppreflîon de poitri- 
ne, procède de quelqu’humi- 
dité ou dun dépôt malin qui 
s’eft formé fer le poumon : il 
ne faut donc pas confondre les 
inflammations de poitrine avec 
toutes les difficultés de ïefpirer* 
& la faignée fera toujours per- 
nicieufe dans ces deux cas ; car 
les efprits alors font fi inférieurs* 
& aux férofités qui caufent Y afth- 
me, & à l’humeur maligne can¬ 
tonnée dans les poumons, quils 
ne fçauroient la mettre en mou¬ 
vement, & lui procurer là çi$ 
culation néceflaire, pour que la 
nature puifle la féparer par des 
conduits deflinés à ces ufagès * 
& par-là, décharger le pou¬ 
mon qui fe trouve formé ' <f un 
tiffu foible & le plus délié, pat 
conféquent très-fufeeptible d’êr 
tre 



• DU SANG HUMAIN. yg 
tre abbreuvé de ces fortes de 
matières, & moins en état par 
la foible/fo de fos refforts, de s’en 
débarraffer : ainû bien loin de 
diminuer fos efprits adifs com¬ 
me il arrive par la faignée, il 
faudroit au contraire, s’il fo 
pouvoir, lui en fournir de nou¬ 
veaux. 

42. 

La faignée inutile dans les 
fupprejjions. 

On ordonne communément 
la faignée du pied dans les rap¬ 
prenions qui arrivent aux fem¬ 
mes ; mais ne foroit-il pas plus à 
propos de donner quelque chofo 
qui fortifie l’eltomac, & lui don¬ 
ne la facilité de précipiter les 
mauvais levains qui empêchent 
qu’il ne puiffo faire la réparation 
du pur & de l’impur,] ce, qui? 
«arrive pas par l’effet de la fai- 



74 Le Conservateur 
gnée ; car outre quelle ni mite 
en rien l’opération de la nature, 
qui ne rejette que l’impur par 
les réglés des femmes , elle af- 
foiblit encore l’eftomaç, & fou- 
vent il arrive i à la fuite de ces 
fortes d’évacuations, que les ma¬ 
lades font tourmentés de maux 
de tête pendant des années » & 
que ces mêmes; foppreflïons ar¬ 
rivent d’autres mois, ou dégénè¬ 
rent en pertes par le relâche¬ 
ment confîdérable que la fai- 
gnée a produit fur les libres, par 
rintroduéfion des focs aqueux 
8l trop chargés de flegme. 
à.zilq c.Gq. zlrm .jt 

. 43: 

La faignée. contraire dans cer¬ 
taines apopléiïiès. 

Quoique je ne défapprouve 
pas: abfolument uneiai gnée dans 
T'attaque d’apoplexie > for^tout fl 



DU SANG HUMAIN. *jf - 
fon fe trouve privé ou trop éloi¬ 
gné des autres remedes, cepen¬ 
dant il fera de la prudence d’exa¬ 
miner fcrupuleufement toutes 
les circonftances de la maladie; 
il faudra s’informer des affiltans 
de la façon de vivre du malade r 
examiner Ion coloris , l’habitude 
du corps, fçavoir Ion âge & pe- 
fer Ion tempérament : car li le 
malade étoit tombé dans cet ac¬ 
cident par un ufàge fréquent 
d’alimens ou de remedes, qui, 
ayant affoibli les digeftions , 
auraient privé la nature de ces 
efprits moteurs qui donnent l’ac¬ 
tion à toute la machine, la fai- 
gnée ferait pernicieufe. 

Il en feroit de même li le 
grand âge ou la foiblelTe du 
tempérament, occafionnoient le 
défaut de chaleur & de mouve¬ 
ment. 

Lorfqu’il arrive dans une in- 

Dij 


' i & Le Conservateur 
flammation que le fang fe foie 
allumé , ou par quelque paillon 
vio lente,ou par quelquautrecau' 
fe inconnue, que ce fang raréfié 
ait rompu les canaux qui le con¬ 
tiennent , & que l’épanchement 
de cette liqueur foit déjà fait 
dans le cerveau, ce qui forme 
plus particulièrement le danger 
évident du malade , la faignée 
feroit encore contraire, parce 
que, comme il faut de toute né- 
ceflïté que la matière extravafée 
foit fondue, raréfiée, ou quelle 
pourriffe pour être enfuite pouf 
fée dehors par les refforts de la 
partie, à quoi la faignée ne peut 
qu’être un obftacle ; il s’enfuit 
que par la perte & la diffipatioo 
du feu qu’elle évaporeroit, la 
nature s’en trouvant privée, de- 
meureroit languifiante Si hors 
d’état d’opérer heureufèment. 



SANG HUMAIN/ 77 
44 * 

Les {félàyans SC les purgatifs 
font fort au-de fus de la fai - 
gnee. 

D’où l’on peut^conclure que 
les délayans , les purgatifs » les 
abforbans ou les confortatifs , 
font des remedes bien au-defTus 
de la faignée : car fouvent quand 
le Médecin différé d’attaquer 
l’humeur peccante, en s’amufant 
ù donner des apofêmes & des 
tifànes, ou enfin à afïoiblir 
ion malade par la faignée, une 
maladie en foi très-légere de¬ 
vient de la derniere conféquence 
& fouvent mortelle. 

Il ne faut donc jamais épuifer 
un malade par des faignées ni 
par une diète trop févere , dont 
on ne doit attendre fouvent que 
les événemens les plus fâcheux. 

D iij 



7*8 Le Conservateur 


4L 

Quarante-huit différentes ohfet» 
valions de Laurent Scholfius , 
Médecin fameux , avant d’en 
venir à la faignée. 

Je fuppofè même qu’il fe 
trouve des cas indifpenlàbles 
pour placer la faignée, il y a 
tant d’obfervations à faire avant 
que de'la hazarder , qu’il fau- 
droit autant convenir ae bonne 
foi qu’elle eft toujours perni- 
cieufe & fou vent mortelle ; 
voyons ce qu’en penfe Laurent 
Scholfius, Médecin célèbre, je 
me luis amufé à recueillir toutes 
les exceptions qu’ilindique avant 
d’employer la faignée , elles fe 
montent au nombre de quaran¬ 
te-huit, &, tout bien combiné -, 
comme on le verra, je ne vois 
pas une feule maladie où le m# 


DU SANG HU'AtÀlti. ■% 

jade ne fe trouve dans le > cas 
d’une de les exceptions. • 
i°. Lorfqueles humeurs font 
brouillées, dit-il, la daignée 
ne peut être que très-mal-à- 
propos ordonnée, parce qu’il 
ne fe peut faire aucune fépa- 
ration du pur & de l’impur. 
2^. Toute faignée trop abon¬ 
dante fait empirer l’humeur 
peccante. 

3°. Comme la faignée inter¬ 
rompt la nature dans fes Opé¬ 
rations , il ne faudra point 
faigner un homme conftipé; 
il convient mieux de lui l⬠
cher le ventre par des émoi- 
liens. 

Ne daignez point après une 
longue maladie ni lorfque 
l’eftomac eft plein. 

5°. Né feignez point une femme 
enceinte, parce que fes hu- 
D iv 



Sto Le Conservateur 
meurs font abondantes, crues, 
& indigeftes. 

4 °. Ne faignez point une femme 
qui a fes régies, on qui va les 
avoir. 

7°. Gardez-vous bien de faigner 
ceux dont le ventricule eft 
foibîe. 

8 *. La faignée eft contraire dans 
les grandes chaleurs. 

5>°. La faignée eft contraire dans 
les grands froids. 

20®. On ne faignera point après 
le coït. 

>i°. La faignée eft mortelle 
après les repas. 

i2°. On ne faignera point dans 
l’enfance. 

ij°. La faignée eft mortelle aux 
vieillards. 

14°. La faignée eft contraire 
dans les maladies chroniques. 

15°. Ne faignez point quelqu’un 


DÛ SANG HUMAIN. Si 
d’un tempérament froid. 

1 6°. La faignée eft contraire à 
quelqu’un d’un tempérament 
lec. 

17 0 . Il ne faut point laigner 
pendant la fièvre. 

18 0 . Ne faignez point le jour 
même que la maladie fe ma- 
nifelle. 

ip°. La faignée caulè. en au¬ 
tomne l’embarras de la vûe 
8 c fbuvent l’aveuglement. 

20°. Il faut avoir égard aux vei¬ 
nes que l’on doit ouvrir ; celle 
du bras doit être ouverte à 
jeun ; celle des mains, des 
jambes, des pieds, de la tête, 
exceptq celle de deflous le 
menton, doit être ouverte 
l’après midi, digeftion faite. 

2i°. Ne faignez point plufieurs 
fois dans l’année, car en éva¬ 
cuant le làng on perd beau¬ 
coup d’eforit vital, & moins 
Dv 



82 Le Conservateur 
il en relie, plus le corps dépé- 
rit & devient foible. 

22°. Quand on ouvre la veine il 
faut bien examiner la couleur 
du fang, s’il n’eft point épais 
& noir, la faignée eft con¬ 
traire. 

zf. Si lorfquon ouvre la veine 
le fang fort d’un beau rou¬ 
ge , il faut la refermer fur le 
champ y car la faignée lèroit 
très-contraire.. 

24 0 . On rifque beaucoup de 
faire faire une faufFe couche 
à la femme groffe que l’on 
làigne, doit dans les premiers 
jours de la grofFeffe ou dans 
les derniers. 

25*0. Ceux que l’on a faignés 
fouvent dans-leur jeuneffe? 
deviennent à l’âge de loixante 
ans foibles & débiles, parce 
que la chaleur naturelle fe 
trouve fuffoquée chez eux? 


DU SANG HUMAIN. 8? 
fur-tout s’ils font d’un tem¬ 
pérament froid Sl humide , 
la fréquente làignée donne 
même cette mauvaifo com- 
plexion. 

2.6°, Vous ne faignerez jamais 
moins de trois jours après 
qu’une forte évacuation for- 
venue aura eeffé. 

27°. Si vous traitez quelqu’un 
d’un ellomac cacochyme » 
commencez par l’évacuer , 
vous le fortifierez enfuite 
avant d’employer la làignée. 

28°. Ceux.qui ont atteint l’âge 

. de quarante ans doivent être 
faignés en vieille luné. 

2p°. Lès adolefcens doivent être 
faignés dans la nouvelle. 

30°. Les jeunes gens depuis 
vingtrCinq ans jufqu’à qua¬ 
rante 5 doivent, . être l faignés 
dans les quartiers de la lune. 

31 0 . On ne daignera dans.des 

D vj 



1 


84 Le CoNSEk vateür. 

fièvres tierces qu’au troifiéme 
* ou quatrième accès, afin d’at* 
tendre que la nature ait ré¬ 
paré l’humeur peccante. 

5 2 0 . Quand on faigne dans les 
fièvres bilieufes, il faut tirer 
bien peu de fang, crainte que 
labile s’enflamme davantage; 
car l’humidité ou lymphe du 
làng fert de frein à la bile. 

33 e . Ne faignez point un corps 
afibibli par quelques caufes 
que ce loit. 

34°. La fàignée caufe fouvent la 
paralyfie, on doit s’abftenir 
par confëquent de fàigner un 
paralytique. 

-y y?. Quand la couleur du tein 
ell mauvaife il faut bien fe 
' garder de faigner. 
j 6°. Il faut bien prendre garde 
que la daignée eft mortelle à 
un convalefcent. 

37°. On ne faignera point ce-j 


EȆ SANG HUMAIN. 8f 
lui dont les humeurs crafles 
abondent. 

38°. La faignéë eft mortelle au 
lortir du bain. 

5_9°. La daignée devient perni- 
cieufe après un exercice vio¬ 
lent, ou une marche forcée. 

^o°. Un malade ne peut être 
daigné pendant la plus légère 
tranfpiration, dans un danger 
de mort' 

41 0 . N’ouvrez jamais la veine 
dans un tems d’oràge, parce 
qu alors l’air portera Ion vice 
dans le fang. 

^2°. Souvent une faignée caufe 
l’évanouifTement ou fyncope, 
la cachexie, la décoloration 
du tein, la difficulté de refpi- 
rer ou orthopnie, la ruine de 
l’eftomac, la perte d’appétit, 
l’enflure des pieds & fouvent 
de tout le corps. 

43°* Malgré la pléthore, quand 



$6 Le Conservateur 
les réglés ou leshémorrhoïdes 
fluent, il ne faudra faigner 
qu’après le flux celle.. 

44. 0 . Quand la veine eft ouverte 
tâtez le-pouls du malade ; s’il 
• manque, fermez fur le champ 
la veine, & faites avaler au 
malade du pain trempé dans 
de très-bon vin, du firop d e- 
pine vinette, ou du jus de 
citron ; faites-en de même fi 
vous vous appercevez que le 
pouls foit trémulent. 

Vuidez le ventre & la vef- 
iie, s’il eft poflible , avant de 
laigner. ' 

4<5°. Ménagez le lang des per- 
fonnes grades, car elles en 
ont peu. 

47°. Quand le fang commence 
à couler, faites-en tomber une 
ou deux gouttes dans un verre 
d’eau, s’il fe précipite au fond 
du vafe, il eft trop épais ; s’il 



DU SAN G HUMAIN. îj 
lùrnage & qu’il le dilToive 
fur le champ avec l’eau, il 
eft trop aqueux .; s’il nagé 
entre deux eaux il eft bon, 
vous, refermerez donc Hir le 
* champ la veine. • ' B ,- 
48°. La petite quantité de îang 
pur proportionnée à la gran¬ 
de quantité de mauvais lues „ 
doit faire généralement rejet- 
ter la faignée. 

Quelles foules d’exceptions ! 
Combien d’oblèrvations fàges 
8 c importantes ! Et combien peu 
veulent en faire les partilàns ou¬ 
trés de la faignée ! 

46. 

JJ art du Médecin conjîjle à dé¬ 
couvrir P humeur-peccante* 

J’ai démontré plus haut que 
notre fang étoit formé des ef- 
prits les plus purs de chacune 



88 Le Conservateur 
des humeurs ; lorfqu’il femble 
vicieux, c’eft donc par la fura- 
bondance ou la mauvaile difpo* 
fition de lune d’elles. L’habileté 
du Médecin confiftera donc 
particulièrement àfçavoir la dé~ 
couvrir, à la forcer dans fes re^ 
tranchemens, enfin à la diftin* 
guer afTez pour l’attaquer feule, 
en ménageant le plus foigneufe- 
ment les autres. 

Ce principe pofé, quels fe- 
cours attendre de la faignée ï 
N emportera-t-elle que l’humeur 
viciée ? Cette humeur Ce prélen* 
tera-t-elle à l’ouverture de la 
veine pour fbrtir la première ? 
non fans douté , puilque chaque 
humeur, à proportion de fon 
vice, devient plus épaifie, par 
conféquent plus lourde, & de-là 
plus incapable de mouvement; 
mais remarquons plutôt que l’ef 
prit le plus fubtil des trois prîn- 


bu SANG humain; Sp 
fcipes s’échappe le premier, par¬ 
ce qu’à proportion de la plus 
grande pureté , il elt plus léger, 
plus vif, & de-là plus facile à 
s’évaporer le premier à l’ouver¬ 
ture de la veine ; de quel prix 
cependant ne nous eft pas cet 
elprit précieux & lî nécelfaire 
à l’entretien du feu qui nous 
anime t 

47 • 

Chaque faignèe doit avancer !* 
terme de nos jours . 

La làignée, en évaporant les 
elprits par qui nous tenons nos 
forces, mortifie tellement cette 
liqueur* ce feu humide enfin 
que nous appelions làng, qu’il 
celfe d’être propre à faire une 
circulation libre & affez promp» 
te pour qu’elle puilfe être pure. 

Je prie mon leâeur de faire 
une attention lerieufe à Jim- 



po Le Conservateur 
portante obfervation que je vais 
faire. 

Remarquons bien que les ar¬ 
tères & les veines que l’on a in- 
tention de vuider par la fai, 
gnée , demeurent cependant 
toujours pleines jufqu a l’extrac¬ 
tion de la derniere goutte de 
làng; mais de quoi fe remplif- 
fent-elles ? de mes groiïîers k 
indigeftes > pompés par le vui- 
de que la faignée occafionne; 
parce que ces fucs n’ayant point 
été allez purifiés pour entrer 
dans les veines , y entraînent 
avec eux nécefTairement toutes 
leurs impuretés. 



DU SANG'HUMAIN. pi 


48. 

La faignée ejl contraire même 
aux obftruclions , quoiqu'elle 
femble utile . 

- Mais-? me dira quelqu’un ? la 
faignée eft donc bonne pour les 
-obftrudtions des vifcèresj puif- 
que vous venez de remarquer 
qu’à proportion du fang que 
l’on tire des veines, elles pom¬ 
pent de nouveaux flics qui ne 
peuvent être pris que dans les 
vifcères. Je fçais très-bien qu’on 
eft dans l’habitude pernicieufè 
de faigner pour lesobftru6tions 3 
ce remede foulage pour quelque 
tems j mais, bientôt après, les 
mauvais lues venant à fo multi¬ 
plier par les froides digeftions 
que la faignée occafionne 5 les 
obftruélions fe forment de nou¬ 
veau ? avec un vice de plus d’é- 



$2 Le Conservateur 
paiflîfTement & de lourdeur, & 
quelquefois de pourriture ; car 
on remarquera que le même feu 
qui digéré des matières que l’on 
veut cuire, fert à les pourrir, 
quand on appauvrit à un certain 
point les matières qui le nour¬ 
rirent. 

D’ailleurs n’auroit-on pas pi¬ 
tié d’un homme qui, pour net* 
toyer le devant de fa porte dans 
la rue , ramafTeroit avec foin 
toutes les ordures pour les met¬ 
tre au milieu de fa falle de com¬ 
pagnie. 

C’eft cependant ce qui arrive 
par la faignée, elle parvient à 
enlever une partie des obftruc- 
tions des vifcères, mais c’eft 
pour en infeéfcer les veines & le 
iang; n’eut-il pas mieux valu 
laifler ces impuretés dans les vif¬ 
cères, pour les vuider par des 
purgatifs convenables, plutôt 



DU SANG HUMAIN. 
que d’en remplir la malle du 
fang, d’où il eft fi difficile de 
les expulfèr? 

4P' 

'Développement des caufes qui ren* 
dent la faignée mortelle dans 
une indigejlion . 

C’eft précifément parce que 
la faignée pompe le vice d’un 
chyle mal digéré, & en infefte 
la maffe du fang, que ce malade 
qui n’avoit qu’un petit embar¬ 
ras , une légère indifpofition 
avant la faignée » tombe dans 
une maladie grave 8c férieufe y 
par la mauvaife difpofition de 
fon eftomac détruit » 8c totale¬ 
ment refroidi par les-fàignées, 
De-là vient encore qu’un ma¬ 
lade que l’on faigne dans une 
indigeftion bien formée , meurt 
prefqne dans Fopération y par- 



94 Le Conservateur 
ce qu’dors les mauvais fucs qui 
remplilTent les veines à la place 
du fang, ne peuvent encore 
avoir mffifamment pris de fa 
nature, & ne font conféquem- 
ment jamais propres àréparer ces 
elprits précieux, échappés les 
premiers à l’ouverture de la vei¬ 
ne , comme je crois l’avoir fuf- 
fifamment démontré, & en phy- 
iïcien.... . 

■ Vezal, fameux, Médecin de 
fon tems., voulant, fiiivre les 
principes ; de Galien , qui' con- 
faille l’ample, faignée jufqu a dé-., 
faillance dans les fièvres conti¬ 
nues., voyant mourir fdnnma^ 
lade' dans ^opération, & • con¬ 
testa de. dire gravement, ’m 0R~ 
TUUS ■ SEGU2fDUM';CAmNEM:ï:ill 
ejl mort dans les réglés* : Voila 
fans doute la confolation du r 
Médecin ; mais jcela répare-t-ili. 
la^pqrte id’un ami,:d’un :pere f 



DU SANG HUMAIN. pf 
d’un époux, enfin de ce que ce 
particulier avoit de plus cher au 
monde ? 

*o. 

(£a faignée corrompt le fang en 
dijjipant fes efjprits. 

La faignée ne peut que cor¬ 
rompre la nature du fàng en 
l’appauvrifTant par la difïipation 
prefque toujours irréparable des 
efprits aâiifs qui le purifient. 

Bien loin de diminuer la caufe 
des maladies 5 la faignée les aug¬ 
mente, & puifque l’amer, l'ai¬ 
gre , l’âpre, le falé ou le trop 
infipide , produifènt les mala¬ 
dies , puifqu’enfin la faignée Sç 
l’attraélion qu’elle produit dans 
les veines en pompant de l’ef 
tomae , de la ratte, du pan¬ 
créas , des reins, du foie, du 
yéfîçule ? du fiel & des autres, 
mteftins, des fucs aigres, amers 



$>6 Le Conservateur 

âpres ou trop infipides, devient 
la caufe efficiente des maladies 
les plus graves ; il s’enfuivra que 
ce Médecin, loin de parvenir à 
guérir fon malade d’une légère 
indifpofition , le conduira fou- 
vent aux portes de la mort par 
la lèule faignée. 

ib. 

Comparaifon du partifait de la 
faignée SC du couvreur fur un. 

toit. 

Je compare le partilan outré 
de la faignée, qui ne veut entre¬ 
prendre aucun malade fans le 
laigner, à ce couvreur, qui, lùrle 
toît d’une maifon qu’on lui con* 
fie, tire bien plus d’argent du 
dégât qu’il fait, que de la be~ 
fogne qu’il doit faire, & qui » 
pour remettre une tuile caffée, 
commence par en enlever une 
douzaine 



DU SANG HUMAIN. 
douzaine tout autour, & les jet- 
ter à la rue, quoiqu’elles fuffent 
très-bonnes, avant de rempla¬ 
cer celle qui manquoit , & qui 
n’oublie point de les faire toutes 
payer au propriétaire. 

Encore peut-on toifer l’ou¬ 
vrage de ce couvreur & Ce dé¬ 
dommager , en ne payant que 
ce qu’il a dû faire : au lieu que 
l’ouvrage du Médecin ne Ce toi¬ 
le point ? & quand on ne le 
payeroit point du tout, çela ne 
réparera pas le mal qu’il a pu 
faire par une faignée mal or¬ 
donnée, qui fouvent devient la 
fource des maladies les plus gra¬ 
ves, pendant qu’un rien, pour 
ainli dire , une tifane légère , 
le régime feul eût pû guérir ce 
malade , au lieu que par la fai¬ 
gnée fon eftomac devenant plus 
loible » ne fait que de mauvaifes 



5>8 Le Conservateur 
digeftions, par le moyen de{- 
quelles fe forment les levains 
épais & âcres qui infeâient le 
fang, 8c qui font fi difficiles à 
détruire. 

Je n’expolè cependant cet 
abus que contre la pratique de 
quelques Médecins, j’avoue que 
le grand nombre ne iàigne pas 
à tout propos ; mais on ordonne 
la laignée fouvent, 8c je prou¬ 
verai, dans la fuite de ce traité , 
quelle.eft prefquetoujoursnui- 
fible, quelque bien qu’elle ait 
paru faire. 

J’admets cependant un cas 
ou, faute d’autre remede, la 
faignée peut donner un foulage* 
ment momentané, c’efi: dans 
l’apoplexie ; mais je voudrois 
qu’on fit cette faignée très-pe¬ 
tite car pour abailfer une co¬ 
lonne d’eau qui monteroit au 


DU SANG HUMAIN. pp 
.ciel il fùffiroit d’en ôter la va¬ 
leur dune cuillerée de fa partie 
inférieure. 

Je fuis bien éloigné de croire 
que la faignée foit mdifpenfable 
dans l’apoplexie : je vais citer 
un exemple qui le prouve. 

- ' S 2 - ; „ 

Exemple de P inutilité de là fai? 

gnée meme dans P apoplexie. 

Il y a quatre ans qu’un hom¬ 
me d’environ cinquante - cinq 
ans, fort replet, tomba pref 
qu’à mes pieds en apoplexie ; 
je fis remplir auffi-tôt à moitié 
une cuiller de fèl bien égrugé, 
que je délayai dans la même 
cuiller avec de l’urine ; je fis 
mettre ce mélange dans la bou¬ 
che du malade, je le fècouai 
bien fort, il dégorgea quantité 
de glaires; je iis faire un lave^ 



ioo Le Conservateur 
ment avec l’infufion de demi* 
gros de tabac en feuilles dans 
un nouet de linge fur trois de* 
mi-feptiers d’eau réduite à demi* 
feptier, demi-heure après mon 
malade eut deux ou trois éva- 
cuations qui le tirèrent d’affaire, 
& je n’ai pas oui dire qu’il fut 
retombé. 

Je fçais qu’on diftingue deux 
fortes d’apoplexies, celle d’hu¬ 
meurs St celle de fang ; mais, à 
dire vrai, c’efl un jeu de mots : 
car l’apoplexie, mêmede fàng, 
ne provient qüe d’abondance 
d’humeurs fuperflues, e’eft pbtir* 
quoi je crois le remède, que je 
viens de rapporter, très - bon 
pour l’une ou l’autre efpece d’a¬ 
poplexie , attendu qu elles pro¬ 
viennent de coaguls, que le fel 
& l’urine font en état de diffou- 
dré, ainff que l’infulion de ta- 
Ce qui facilite beaucoup 



DU SANG HUMAIN. ICI 
plus que la faignée, l’évacuation 
néceiîaire à la cure de cette ma¬ 
ladie. 

SI- 

Raifort, de préférer certains re- 
medes doux à la faignée* 

Gomme notre fang eft com- 
pofé de trois humeurs, ledquel- 
les, à proportion de leur qualité 
bonne ou mauvaise, prefTent 8c 
Surchargent , nos vaifïeaux, il 
s’enfuivra qu’un vomitif donné, 
à propos y un purgatif doux ou 
un lavement combiné félon l’hu¬ 
meur peccante, dégagera les 
vaifïeaux tout aufîi bien que la 
daignée, avec tant de difFérence 
que cette forte d’évacuation 
n’aura point appauvri le dang 
du malade, en détruidànt une 
portion précieufe de l’humide 
radical qui rélide principale¬ 
ment dans cet efprit de dàngy 



io2 Le Conservateur 

qui s’échappe le premier à l’ou¬ 
verture de la veine. 

PafTons encore fur les acci- 
dens à craindre dans l’opération 
de la faignée , c’eft un artère 
coupé par la maladreffe d’un 
Chirurgien, ou la crainte du 
malade qui retire fon bras ; e’eft 
une fuppreffion que la crainte 
de la faignée occafîone à une 
femme foible & qui s’épouvante 
des moindres chofes ; mais cet 
article ne peut entrer que dans 
le chapitre des événemens mal¬ 
heureux, cela n’efl pas ordi¬ 
naire , quoique cela n’arrive que 
trop. 

D’ailleurs il eft tant de pré¬ 
cautions à prendre dans la pra¬ 
tique de la faignée, & l’on en 
veut prendre li peu, qu’il faut 
peu s’étonner de lès ravages. 

Faifons grande attention à la 
remarque que je vais faire. 


DU SANG HUMAIN. IO3 

S4‘ 

La Jaignée riejl nécejfaire dans 
aucune maladie , puifque Ion 
a des exemples de chaque ma¬ 
ladie en détail guéries Jans fon 
fècours. 

Nous voyons que la faignée 
ne fuffit Jamais au Médecin le 
plus habile pour guérir radica¬ 
lement fon. malade ; cette fai-, 
gnee fera toujours fui vie d’un, 
purgatif, d’un délayant ou d’un 
confortatif. 

Nous remarquerons au con¬ 
traire que chaque maladie peut 
être guérie par un remede con¬ 
venable à fon genre ; on a de 
ceci des exemples tous les jours 
fur chaque différente maladie, 
le plus difficile eft de découvrir 
1 humeur peccante : car on con- 
noîtaffez de remedes? leur choix 
t E iv 



'104 Conservateur 
feul annonce le bon Médecin &; 
guérit le malade. 

D’après ces deux importantes 
obfervations, il fera très - pru¬ 
dent de fe détacher d’un remede 
violent, qui le trouve toujours 
jjnfuffifànt pour guérir, & qui 
caufè les maladies les plus gra¬ 
ves & les plus longues , quand 
on l’adminiftre en certaines cir- 
confiances, lorfqu’on. échappe 
au tombeau, furie bord duquel 
elle nous amene. 

SS- 

On ne faignera jamais fans 
s’expofer à rencontrer une in~ 
digeflion 9 raifbn de plus pour 
rejetter la faignèe dans tous les 
cas. ' 

Que ne rifque-t-on pas quand 
on faigne un malade dans une 
indigeflion ? Combien de ma-. 


DU SANG HUMAIN.' 10? 
lâdes étouffés fur le champ par 
cette opération. 

Un Médecin prudent me di¬ 
ra : J ai foin de trlinflruire du 
malade comment il a mange la 
veille : s'il me répond qu'il a le 
plus légèrement dîné SC qiûil n a 
point Joupè du tout, je fuis tran¬ 
quille fur îarticle de Tindigef 
tion y f ordonne la fçtignée fans 
crainte. 

Raifon infuffifante : des mala¬ 
des n’ont-ils pas couvé plu- 
iieurs, jours une indigeftion 3 les 
uns cin q, les autres huit l N’a- 
t-on pas vu-dés^ ^êns; rendreati 
bout de dix : jpurs 5 ,:;à d’aide &s 
yomitifs y des- ehàmpignon% pat 
morceaux & en nature qui :,n’a- 
veient /point été . digérés ? Quelle 
fera donc la furète du^MeJeçin, 
qui fe fera coejeûtjéîgpeuryç^ 
donner la fai gnée;> -de fçavoir 
que fon malade étoit à jeun.de 
E v 



îô6 Le Cônsérvateûr 

la veille ; les gens qui ne vont à 
la {elle que tous les quinze jours, 
ne peuvent-ils pas avoir une in- 
digeftion de quatorze ? 

Je dis plus, nos maladies 
quelconques viennent d’indi- 
géftion , puifque fi les humeurs 
eu fient été allez digérées & 
allez fluides pour filtrer libre¬ 
ment , elles n auraient point 
caufé, par leur féjour en une 
partie du corps, telle ou telle 
maladie. En effet pouvons - nous 
être malades de quelque mala-- 
die poflibie & faire une bonne 
digeftion T Si Ion convient des 
effets pernicieux de- la làignée 
dans fèadigeftion, il faudra 
donc - la rayer absolument du 
catalogue des -remedés , puif- 
q'uibne peut exiffer de maladie 
fans indigeftion. 
v - Goifibién de jeunes gens' en- 
levés à lia fleur de leur âge, par 



DU SANG HUMAIN. 10? 
ce que les feignées avoient ruiné 
leur poitrine, leur eftomac } & 
enfin leur tempérament f 
Combien de gens en parfaite 
fenté , dont la vue devenue foi-* 
ble, quoique dans une jeuneffe 
brillante, ne fè doutent pas 
qu’ils doivent cette fatiguante 
indifpofition à la feignée ? 
i" Combien d’aveugles devenus 
tels par cette funefte opération > 
& fur le champ ? Je vais citer 
trois exemples frappans, fer 
plus de dix qui font à ma con~ 
noiflance. 

^ > S 6 - - 

Trois exemples qui prouvent què 
lafaighée épaijfit les humeurs % 
éC devient par là. la Jource de 
£ aveuglement , quand elle ne 
-dctdpd pds des aêcîiefts plus 
graves, . * . L . ~ . 

- y.o. I e:>: . - - . ' 

Un jeune homme d’enyiro» 
E vj 





io8 Le Conservateur 
dix-huit ans, plein d’agrémens, 
fils unique, d’un efprit bien or¬ 
né , enfin lelpoir de là famille, 
s’étoit avifé de prendre un bain 
dans la rivière ayant bien chaud; 
de retour au logis un mal de 
tête violent le déclare, le Mé¬ 
decin arrive, prend cet acci¬ 
dent pour une pleuréfie com¬ 
mencée, quoique ce ne fût 
qu’une courbature, en confé- 
quence ordonne la faignée du 
bras droit : pendant l’opération; 
le malade fent fa vue s’affoiblir , 
lès yeux le troublent. Il perd: 
totalement l’ufàge d’un œil ; 
quelques, heures après le JVÎéde?= 
cin arrive de nouveau, touché 
de cet accident, & croyant y 
porter remede par une fécondé 
làignée au bras gauche, il l’or¬ 
donne : pendant cette Îunelle 
opération le malade perdit Tu- 
fage de Pautre œii & devint ton ■ 


DU SANG HUMAIN*. IOp 
talement aveugle , au point de 
rie pas diftinguer la fplendeur 
des rayons d’un beau foleil, d’a¬ 
vec les ombres épaiffes de la nuit 
la plus noire. 

■ Une femme eftfaignée le foir 
àïèpt heures, je rie fçais pour 
quelle maladie, elle fotipe à 
neuf légèrement., s’endort à 
dix » dort tranquillement- juf-; 
quiau lendemain huit heures dur 
matin, & prend le plus beau 
jour pour la nuit la plus fombre : 
elles’apperçoit que cette cruelle 
fkignée de la veille lui coûte la 
Vue. ... / : V ? 

- ■ JMb Orangé, Négociant à Pa¬ 
rs, -Mr. logé spour lors '-rue aux 
Ours-,:fe trouvant attaqué d’une 
fièvre violente, effc i faigné le 
foir à nuit clofe;, ,1e lendemain 
avant jour, on lui apporta une 
potion , il s’apperçût qu’il ne 
voyoit point, & demanda pour- 




ïio^ Le Conservateur 

quoi l’on venoit fans lumière 
pour lui donner cela ; il s’em- 
portoit, lorfqu on lui dit que la 
perfonne qu’il reprenoit avoit 
un flambeau à la main bien al¬ 
lumé ; il prit cela pour un épaif- 
fiflement d’humeurs & un Am¬ 
ple éblouiflement > il n’en fut 
pas autrement allarmé ; mais le 
lendemain le grand jour lui con¬ 
firma Ion malheur, il efl aveu¬ 
gle depuis quinze ans, & n en a 
pas quarante-cinq. Quelle fata¬ 
lité ! que de réflexions à faire ! 

Ces exemples 8c quantité 
d’autres que j’épargne au lecteur 
pour ne pas le fatiguer, prouve¬ 
ront que la fa ignée épaiffît les 
humeurs ; de-là raille maux, plus 
ou moins dangereux, dont elle 
eftla funefte caulè. 


DU SANG HUMAIN. III 


$-7‘ 

La faignée produit la paralyjîe 
SC bien (Vautres maladies . 

Je fupplie mesle&eurs de cher¬ 
cher un paralytique qui n’ait pas 
été faigné : pourquoi la paraly- 
fie devient-elle la fuite prefqu’in- 
difpenfable de l’apoplexie ? c’eft 
par la faignée que mal-à-propos 
on croit indilpenfable dans cette 
maladie ; jamais vous ne verrez 
un apoplectique tomber en pa- 
ralyfie, £ l’on a trouvé les 
moyens de le guérir fans fai¬ 
gnée 5 au moins je n’en ai pas 
encore vû d’exemples dans les 
perfonnes à qui j’ai donné des 
foulagemens dans cette mala¬ 
die. Les fàchets d’Arnoult n’au- 
roient pas tant fàuvé de mala¬ 
des de ce genre > £ la iàignée 



ni Le Conservateur* 
étoit un remede indifpenfablë 
en cette occajfîon. 

Combien de goutteux aux¬ 
quels une faignée donna la 
mort, en fixant le vice coagu* 
latif de cette maladie dans M 
tomac ! 

Combien de catharreux Sc 
d’afthmatiques , combien de 
pulmoniques devenus! tels par 
la faignée, combien n’eft-il pas 
rare de trouver un fujet .attaqué 
de Tune de ces maladies, dans 
le nombre de ceux que l’on n a 
jamais laigné ! Je dis jamais, 
parce que les mauvais effets de 
la faignée ne font pas toujours 
prompts & lubits, à caufe que 
les humeurs n’ont pas, dès les 
premiers tems, le.degré d’épàifi 
mfement qui caufe les maladies, 
par les obUruétions qui; fe for- 
ment petit-à-petit, & que. cet 



DU SANG HUMAIN fl| 
épaiffîffement ne vient à un cer¬ 
tain degré? que quelquefois dans 
féfpace de pluüeurs mois, à 
proportion du rallentilTement 
de la circulation ? & des digef- 
tions que la faignée produit 
chaque jour. 

I f* 

Sentiment du grand Dumoulin , 
fur le traitement général des 
1 maladies. 

Le célèbre Dumoulin difoit 
au lit de la mort ? à ceux qui 
f entourbiènt & qui pleuroient 
fa perte : « Je laifïe après moi 
» deux plus grands Médecins? 

» ce font l’eau & la diète ». 

Ce grand homme dit-il tou¬ 
jours auffi vrai pendant fa vie ? 
& dans les confultations qu’on 
lui payoit fort cher ? 

Quels malades en effet ne 



ïi4 Le Conservateur 
pourroit-on pas rétablir par les 
îècours de la diète & de l’eau ? 
Si ce régime ne guérit pas radi¬ 
calement, au moins foulage-t-il 
beaucoup : car l’eau , que tout 
le monde reconnoît pour le 
meilleur des dilTolvans, délaye 
les humeurs èpaifïîes, dès-lors 
les rendant plus légères, leur 
donne la facilité d’être charriées 
par notre fang dans toutes les 
parties qu’elles doivent nourrir, 

Ï9- 

Ne pas confondre ta diète SC U 
jeûne . 

La diète repole un eftomac 
furchargé, mais qu’on ne con¬ 
fonde pas la diète avec le jeûne 
rigoureux qu’on ordonne fou- 
vent au malade, car la diète ra¬ 
fraîchit, & le jeune échauffe; la 
diète eft la privation: de quel*? 



DU SAN (j HUMAIN. 115" 
ques repas, le jeune eft la priva¬ 
tion de tout aliment. Il me fuf 
fira donc que le malade , par 
prudence & par dilcrétion » le 
prive d’une partie des alimens à 
fonulage, & lîir-tout de ceux 
qui pourroient être lourds à fou 
eftomac, & rendre là digeflion 
pénible, lente > & la Iburce 
d’une quantité de lues épais 8c 
vifqueux. 

Loin d’interdire tout aliment 
à mon malade, je veux qu’il 
mange, s’il a faim, une aile ou 
une cuilTé de volaille rôtie, une 
loupe, un œuf frais, enfin ce qui 
pourra flatter Ion goût dans la 
clafle des alimens légers 8c de 
bon fuc ; je ferai fatisfait lï 
mon malade relie fur Ion appé¬ 
tit : voila la diftindtion que l’on 
doit faire de la diète 8c du 
jeûne. 

Quelque Doreur me dira ? 



Le Conservateur: 

« Quoi, Moniteur , vous voulez 
» quon foive l’appétit du ma- 
» kde, qu’on lui donne à mari/ 
» ger, s’il a faim; y penfez-vous î 
» Ne commettrez-vous pas une 
» imprudence marquée, ii ce 
» malade fe trouve avoir de là 
» fièvre f » 

Je réponds, qu’après deux 
cents expériences je me fois ap- 
perçu que les malades, vérita¬ 
blement atteints de la fièvre, 
jn’avoient point d’appétit : je dis 
donc qu’il faut que mon malade 
mange, s’il a faim,, parce que 
l'appétit, proprement dit, n’eft 
autre chofe que le delîr d’une 
chofe dont la nature a befoin 
pour faire fes fonctions. N’a¬ 
vons-nous pas l’exemple d’un 
malade , condamné , félon les 
Médecins , à périr fous vingt- 
quatre heures, & en consé¬ 
quence abandonné, qui, dans 


Dü SANG HUMAIN. 1 17 
la violence & l’impétuofité de 
fa fièvre ? demanda un citron : 
comme ce malade étoit con¬ 
damné , on lai donna, il le dé¬ 
vora tout entier en quatre bou¬ 
chées ; au bout de trois heures 
la fièvre fe calma par le moyen 
d’une fèlle qu’il fit, & par la¬ 
quelle il rendit des matières noi¬ 
res & fulphureüfès qui caufoient 
fà maladie. La raifbn de ceci eft 
fimple j l’acide précipite Jes fou- 
fi-es, voila pourquoi le citron , 
par fbn acide, opéra fi favora¬ 
blement ; la faignée n’avoit fait 
qu’augmenter l’état cruel de ce 
malade , on n’ofbit plus en faire, 
parce , qu’à la fuite de fes accès 
violens il tomboit en fyncope, 
& dans un abattement de for¬ 
ces, qui lui laifïbit à peine cel¬ 
les de fe tenir fur fon féant. 



îjS Le Conservateur 

60. 

Diminuer SC choifir les aliment 
d’un malade , efl ce que jap* 
pelle diète. 

Je me bornerai, comme j’ai 
-dit plus haut, à diminuer les ali- 
mens de mon malade, fans lui 
retrancher; à lui faire faire qua¬ 
tre repas légers au lieu d’un fort 
repas, que ce malade eût pris 
fur lui de faire, dévoré par une 
faim qui l’auroit fait palfer fur 
toute conlidération, & fur la 
crainte d’une indigeftion qui de¬ 
vient indifpenfable dans un eflo- 
mae trop refroidi , puifque le 
froid naît du repos. 

Ce n eit donc point le jeûne 
que je veux ordonner à mes ma¬ 
lades , en prefcrivant la diète » 
ce n’eft point cette privation 
barbare de tout aliment qui fait 
mourir une partie des malades 


DU SANG HUMAIN. I Ip 

àe faim ; je n’imiterai point ce 
Médecin indifcret ou peu inf- 
truit de la nature & de les opé¬ 
rations , qui fait jeûner lès ma¬ 
lades à la fuite des faignées dont 
il les a tourmentés, & affoibli 
au point, qu’il fe voit réduit à 
leur faire donner l’Extrême- 
Onftion pour derniere ordon¬ 
nance. 

6 j 

Singulier abus que les femmes 
font de la faignée. 

A voir l’abus que les femmes 
font de la faignée, ne diroit-on 
pas quelles en font un jeu, dont 
il n’ell pas le plus petit accident 
à craindre ? 

Combien de femmes, en par¬ 
faite fauté, feulement à deffein 
de prévenir une maladie, le plus 
fouvent imaginaire, &: dont el¬ 
les ne Tentent aucun avant-cou- 



'i20 Le Conservateur 

reur, le font fàigner par pure 
précaution : parce que, difent 
elles, Tannée palFée à pareille 
tems à-peu près elles eurent une. 
maladie violente ; c’eft pour la 
prévenir cette année. Quel abus! 
celt-à-dire , que pour prévenir 
une maladie quelles n’auroient 
peut-être jamais eue/elles le 
mettent dans le cas des accidens 
les plus graves, & dont elles 
demeurent quelquefois affè&ées 
le relie de leur vie.. 

D’autres femmes par coquet* 
terie le font faigner , & feule- 
mënt fur ce que leur miroir an* 
nonce un tein trop allumé » ou 
quelles le voyent plus hautes en 
couleur que la ..veille. Le Chi¬ 
rurgien eft mandé fur le champ» 
fi ce Chirurgien prudent refuie 
d’employer trop légèrement fon 
miniftere, & qu’il ofe faire dès 
repréfèntations, on le remercie*. 

ou 


mj SANG HUMAIN. 121 
ou fi Ton a quelqu’empire fur lui, 
on le fait obéir ; la faignée, dit 
cette femme, peut feule rendre 
à fon tein la fraîcheur ordinaire. 
Que ne feroit pas une femme , 
puifque fon fàng lui 'ooute fi 
peu, dans l’efpoir d’en être plus 
belle l 

62. 

Effet pernicieux de la faignée que 
P on fait à deffein de diminuer 
une inflammation . 

Examinons cependant f effet 
de la faignée la plus prudem¬ 
ment ordonnée, voyons dun 
œil de Phyficien & déîintérefie, 
quelles en feront les fuites. 

Je me fuis apperçu que fi la 
faignée fembloit rafraîchir, ce 
n’eft qu en diminuant les efprits 
aftifs qui font filtrer nos hu¬ 
meurs dans nos veines ; par-là 
diminuant notre chaleur natu- 



%22 Le Conservateur 
relie, nous regardons çet affaif. 
fement comme un calme , mais 
c’eft un mal réel, puifque ce 
n’eft que par le refroidiffement 
que cette faignée change l’état 
du malade. 

Combien de malades en effet, 
crus rétablis par l’effet dès fai* 
gnées, font peu de tems après 
devenus hydropiques ? parce que 
les efprits les plus aétirs & les 
plus purs, s’étant évaporés à 
l’ouverture de la veine, ont ré¬ 
duit les artères à fe remplir 
d’eau & de flegme, à mefure 
que le fang fe dillîpoit; il s’en 
eft fùivi que la lymphe , deve¬ 
nue furabondante, a furchargè 
la mafTe & déterminé les liqui¬ 
des à prendre fa nature, & que 
cette maffe du fàng privée de la 
portion du feu néceffaire à la 
digeflion & à la diffîpation du 
flegme furabondant , a produit* 


DU SANG HUMAIN. J 2f 
par Ton engorgement, l'hydro- 
pilie à ce malade. 

«?• 

Le fang contient en lui un prin~ 
cipe de vie. 

Point de fang, plus de vie; 
que l’on verfe le fang de l’hom¬ 
me le plus fort, & tout celui de 
l’animalle plus robufte, on le 
prive én même-tems de la vie. 
Le lang eft donc le liège de la¬ 
me fènfitive ; il s’enfuivra, par 
conféquent, qu’en ôtant une 
portion du fang de cet animal, 
j’affoiblis en même-tems en lui 
le principe de vie , dont il eft 
très-clair & très-diftinâement 
prouvé que le fang eft la vérita¬ 
ble bafe. 


Fij 


i2^ Le Conservateur 

64. 

Erreur de ceux qui croyent que U 
foie, forme du fang ajje^ p Ur 
pour fuppléer à /’ évacuation 
de La faignée . 

Quelques Médecins ont cru 
que le foie formoit aflez de fang 
pour, fuppléer aux {àignées les 
plus abondantes. 

Je conviens que le foie & les 
autres inteftins fourniflent à la 
réplétion des veines ; mais com¬ 
me par la fàignée on lui fait 
quadrupler fes fonctions, il n’a 
fourni que de mauvais fucs vif- 
qieux & pleins de flegme, qui 
n? pourront, dans la fermenta¬ 
tion quiïe fait, fournir le quart 
des efprits diflîpés par la fai¬ 
gnée : voila le mal réel & à ja¬ 
mais irréparable que produit la 
faignée ; parce que nous ne vi« 


DU SANG HUMAIN.' I2f 
vons long-tems qu’à proportion 
de la quantité plus ou moins 
grande ctefpril de fang que nous 
confervons pour digérer. 

Enfin tout ce qui refpire fub- 
fifte par le mouvement : or les 
efprits font l’ame du mouve¬ 
ment par qui nous refpirons ; 
fuyons donc la fàignée, puifque 
les efprits les plus purs du fang 
fortent néceffairement les pre¬ 
miers à l’ouverture de la veine. 

6 S- 

La Jaignèe nefl pas nécejjaire 
pour le mal de tête } quoique le 
fang s y porte . 

Quelqu’un me dira : Le fang 
me portoit à la tête, je fus fur 
le champ foulagé par la faignée. 

Je veux bien convenir avec 
ce malade, pour un inflant, que 
le fang pouvoit lui porter à la 
F iij 


' ï 2 <S Le Conservateur 

tête, mais en même-tems je di¬ 
rai que cette révolution de fan» 
prend fa fource dans la pléni¬ 
tude des humeurs, &“ leur dé¬ 
faut de circulation bien moins 
que dans la furabondance du 
fan g car les humeurs, par leur 
épaiffiffement? engorgent les 
parties inférieures? ferment le 
pafFage au fang, & le forcent 
de fe porter à la tête. 

Ainlî ce malade que la fài- 
gnée vient de foulager ? l’eut été 
bien davantage par un lavement 
combiné félon fan tempéra¬ 
ment: un remede : auffi iimple 
eut produit un effet plus folide ? 
car li l’on ne joint à la faignée 
les délayans & les purgatifs ? on 
n’en reçoit qu’un loulagement de 
peu de durée ? & pour l’ordi¬ 
naire le lendemain on fe fent 
plus malade que la veille : cela 
nous prouve alfez que ce font 


. BU SANG &UMAÏN. 12$ 
ces délayans & ces purgatifs qui 
opèrent de bons effets ? & non 
pas la faignée. 

66 . 

Un mauvais ejlomac produit fou- 
vent des maux de tête* 

D’ailleurs prefque tous les 
maux de tête ont leur fource 
dans l’eftomac? qui, fouvent 
trop affaibli par quelque eaufè 
étrangère, ou trop foible de fa 
nature, ne peut faire librement 
fes fondions, & fè trouvant 
trop froid pour diftilier , avec 
une vigueur fuffifante, les ali- 
mens qui le chargent, nenvoyé 
que des vapeurs pelantes au cer-* 
veau, qui ne fe fixent à la tête 
que parce quelles ne font pas 
pouffées par un feu affez vif, ca¬ 
pable de leur donner l’aétion 
née affaire pour fe diffribuer 
F iv 


■128 Le Conservateur 
dans les plus petits vaifîeaux ; 
d’ailleurs le feu ne peut cliaffer 
le fang dans les capillaires, qu’a- 
près la purification des parties 
groffieres qui I’épaifMent, eft- 
ce par la faignée qu’on y par- 
viendra? puifque par elle le fang 
le plus léger & le plus pur/or- 
tira le premier, en laiïïant après 
lui les parties les plus crafles 8t 
les plus lourdes qui furchargent 
la malTe de plus en plus, loin 
d’être parvenu à l’alléger par 
cette opération. 

D’après ces remarques 8t cet¬ 
te foule de preuves que la fai¬ 
gnée fe fait toujours aux dépens 
de l’eftomac , quels fecours at¬ 
tendre d’elle pour guérir un mal 
de tête ? Peut-elle rétablir les 
fibres d’un eftomac refroidi ? 
n’eft-elle pas plutôt faite pour le 
ruiner & le glacer entièrement? 
D’où vient un Médecin défen» 


'DU'SANG HUMAIN. 12g 
droit-il à fon malade de manger 
du tout lorfqu’ilvient d’être fai» 
gné, & même le lendemain? s’il 
n’étoit bien convaincu que la fai¬ 
gnée s’efl faite aux dépens d’une 
partie de la chaleur nécelfaire à 
l’eftomac? par confëquent à la 
vie ? 

Si- 

Lafaignée contraire à lafluxion 
de poitrine . 

On convient que la faignée 
peut faire dégénérer un rhume 
fimple en fluxion de poitrine? 
& cependant on ordonne la fai¬ 
gnée pour guérir la fluxion de 
poitrine. Quel fîngulier contraf 
te ! Va-t-on replonger un noyé 
dans la riviere pour lui faire re- 

f orger toute l’eau qu’il a pû 
oire ? 

Des tifanes Amples ? des cor¬ 
diaux Sc des lavemens m’ont 
F y 


130 Le Conservateur 

toujours réufîî dans ces mala¬ 
dies , & me les ont tirés d’af¬ 
faire en cinq ou neuf jours, 
dont un feul de convalefcence: 
ces remedes ne les ont point fa¬ 
tigués ? je leur ai laifTé manger 
de la foupe quand ils ont eu 
faim, en leur faifant boire deux 
ou trois doigts de vin d’Alicante 
en même tems : je remarquerai 
en pafTant, que depuis dix ans 
je n’en ai pas vû mourir un feul 
de cette maniéré , au lieu que 
de dix malades que l’on Aligne¬ 
ra dans cette maladie? je parle 
pour la deftrudfion d’un tiers. 

68 . 

'Les lavemens ? les délayans > les 
purgatifs SC la trànfpiration ? 
Jont les remedes fiipérieurs . 

Je préféré dans toutes les 
maladies? les lavemens? la tranf 


DÎT SANG Ht/MAfNV Î|I 
piration Sc ies purgatifs, parce 
que ces remedes divifent la lym¬ 
phe trop épaiffie Sc purgent la 
furabondante, en cela je les 
crois, à tous égards, préférables 
à la faignée r dailleurs il eft rare 
que l’on meure par les autres 
évacuations, Sc dans leur opé¬ 
ration , conduite par un Méde¬ 
cin éclairé, au lieu que la li¬ 
gnée détruit un quart des ma¬ 
lades ; fon martyrologe eft le 
plus étendu. 

J’entends un Médecin qui s’é¬ 
crie : « Nous ordonnons la lài- 
» gnée pour faciliter la tranfpi- 
» ration. » 

N’avez - vous donc que ce 
moyen ? Sc puilque la tranfpira- 
tiondes humeurs eft interceptée 
par leur épailîîflement , que 
n’employez-vous les déiayans ? 
après que des lavemens auront 
dégagé les premières voies. 


132 Le Conservateur 

6 9 . 

La faignée contraire au mat de 
tête, SC peut le donner. 

Il me paroîtra toujours fingu- 
lier que l’on fe fade faigner pour 
un mal de tête, lorfque je voü~ 
drai faire attention qu’un ma¬ 
lade quon vient de faigner n’a 
qu’à manger à fon ordinaire, 
une heure après le mal de tête 
le prend; la faignée fera donc 
un foîble remede pour guérir 
un mal de tête, puifqu’elle a pû 
le donner à celui qui ne l’avoit 
pas: remarquez bien que ceux 
qui fe font trouvés guéris d’un 
mal de tête après la faignée, 
n’ont point été guéris par fon 
opération, mais bien par le fe - 
cours des autres remedes em- 




DU SANG HUMA ÏN, îjf 
Quelqu’un me difoit un jour i 
Mon fang étoit corrompu, je 
voudrais que vous l’euflîez vu, 
il ëtoit affreux, cette fàignée 
étoit indifpenfable. 

Quelle erreur grofïiere f no- 
tre fang ne peut fe corrompre 
dans nos veines fans que la mort 
ait précédé cette corruption de 
quelques momens. Dites que vo¬ 
tre fang étoit mêlé de fubftan- 
ces corrompues ; mais je fup- 
pofè, pour une minute^ quevor 
tre fang fut corrompu, efl-ce 

E ar la faignée qu’il peut fe réta- 
lir ? Quel eft le Marchand de. 
vin qui, pour rétablir fon vin 
gâté, commencera par en jet- 
ter la moitié dans la rue? 


>34 Le Conservateur 
7 °* 

Notre fan g ne peut fe corrompre 
pendant notre vie. 

je ne conçois pas comment 
un Médecin petit dire à fon ma¬ 
lade : « Votre fang ëft tout cor- 
» rompu , il faut le rétablir. » 
Quel eft donc l’homme en état 
de rétablir une chofè corrom¬ 
pue ? Quel exemple donnera- 
t-on d’un tel miracle ï Dieu feul 
a pu le faire dans la perforine du 
Lazare ; mais une plante, un 
animal , tout être enfin une fois 
corrompu , ne fçauroit retour¬ 
ner à fà nature première, parce 
qu’il faudroit lui rendre lefprit 
qui l’animoit avant de fe cor¬ 
rompre, & c’eft l’ouvrage d’un 
Dieu. 

Le fàng, dans un homme vi¬ 
vant, ne peut jamais fecorrom- 


DU SANG HUMAIN. l%f 
pré, parce qu’il elt formé de 
Tefprit le plus pur des quatre 
humeurs ; les maladies ne font 
& ne peuvent donc être dans le 
fàng, mais feulement dans la 
fùrabondance ou l’impureté de 
telle humeur, & nullement en 
lui, parce qu’il efl plus léger, 
plus chaud, plus agile, plus fub- 
til & plus pur que les humeurs 
qu’il charrie, delliné qu’il fut 
par le Créateur à fe répandre 
dans le corps pour Fanimer, le 
nourrir, le conferver le faire 
fubfifler, parce qu’en lui, plus 
particulièrement qu’aux autres 
humeurs, réfide ce feu vivifiant 
par qui l’homme exifle, auffi 
elt-il toujours le dernier à le cor¬ 
rompre ; & quand il arrive à la 
corruption, ce n’efl que quel¬ 
ques inflans après la mort du fu- 
jet en qui cela arrive. 

On s’apperçoit, par la priva- 


r ij 6 Le Conservateur 
tion du feu qui circule avec no« 
tre fang. & que nous rendons 
avec la vie, que la mort ne nous 
a pas plutôt fermé les yeux, que 
notre fang n’eft plus fang; mais 
une matière lourde, craffe & 
corrompue, privée deTefprit 
qui la préfervoit de corruption. 

On doit d’autant moins fe 
flatter de parvenir à faire chan¬ 
ger un état de corruption par la 
Signée, que la diminution de 
la chaleur que l’on éprouve par 
cette opération, feroit bien plus 
capable de l’avancer que de la 
retarder. 

Nos maladies même les plus 
malignes, viennent fcuvent de 
l’effet dune caulè inconnue ré¬ 
pandue dans l’air, ou infedés 
d’alimens, deux cailles que la 
fai^née ne peut corriger ni dé¬ 
truire. 

Que m’avons-nous le bon fens 


DU SANG HUMAIN. 3^7 
«les Chinois ou des habitans du 
Japon, qui ne fe faigrtent ja¬ 
mais, & qui vivent lomg-tems , 
qui n’ont que des indifpofitions 
& jamais des maladies éternel¬ 
les , comme celles qu’enfante la 
làignee , par la deflru&ion de 
l’humide radical. 

Que ne fuivons-nous toujours 
la nature & là fimplicité, dans 
un objet aufli important que la 
fanté. La nature choi/ît les re¬ 
medes fimples, faciles à trou¬ 
ver, qûe tout le monde peut 
préparer tons dépenfe ; mais l’a¬ 
varice dés hommes inventa ce 
vain étalage de comportions 
inutiles, quand elles ne font pas 
tout-à-fait pernicieufes & même 
mortelles. On n’eftime que les 
remedes qui viennent de l’Inde 
ou de l’Arabie, tandis que les 
véritables remedes fe trouvent 
chaque jour à la table du pau- 


'138 Le Conservateur 
vre, puifque les deux premiers 
& les plus'Spécifiques,- font;, fans 
contredit} la modération. &. 1 3 
fobriété. , : 

7 1 * 

La Chine SC le Japon font les 
pays lès plus peuples ', où Ton 
Vive moins jù)et aux maladiesh 
SC plus vieux, • Là joignit y 
tjl inconnue. 

Ne remarque-t-on pas que les 
vaftes empires de laiCliine k 
du Japon , -.font les plus peuplés 
qu on .coniioiffe. : on allègue 
quelquefois la différence du cli¬ 
mat , on neft pas fâché de don¬ 
ner cette raifon pour expliquer 
ce qu'on ne comprend pas; mais 
nous remarquerons en paffant 
qu'il elt des contrées à la Chine 
de la même température d’air 
que celle de differentes parties 
de notre France : on y guérit 



DU SANG HUMAIN. 13P 
parfaitement bien fans le fe- 
cours de la Lignée. L’on n’y voit 
point de paralytiques jl’afmme y 
eft encore plus rare , & les vieil¬ 
lards de cent ans & plus y font 
très-communs. 

Cela n’étonnera point un Phy- 
fîcien, qui remarque qu’avant 
d’avoir pû tirer à fon malade 
une once de bile par la Lignée, 
on l’a privé, peut-être> de trois 
onces d’efprit de fang qui s’é¬ 
vapore, perte irréparable : car 
cet efprit le trouvoit combiné 
par l’Etre fuprême, pour tem¬ 
pérer nos humeurs & les tenir 
dans un jufte équilibre* 

Concluons de ceci que, pour 
parvenir à la guérilbn des ma¬ 
lades, il fuffira de délayer les x 
humeurs épaiflîes & de travail¬ 
ler à l’évacuation des furabon- 
dantes, effet que la faignée ne 
pourra produire ; auffî quelques 


t4 ô Le Conservateur 
Médecins ne l’employent - il 3 
<jue comme préparative à d’au¬ 
tres remedes ; barbare maxime ! 
Peut-on donner comme un Am¬ 
ple préparatif ou remede de 
précaution, celui qui, fait à 
contre-tems, met le malade en 
danger de mort f 

7 2 v 

Aucun Médecin , pattifan de h 
faignée , ne peut donner de 
rayon fuffifante pour s*ajjurer 
qiùil na pas mis tel ou tel ma ? 
lade en danger de mort. 

En effet quel eft le Médecin 
allez hardi pour affirmer qu’il 
n’aura jamais expofé la vie de 
fon malade en le faifant faigner 
dans une indigeftion ?-Je vais 
citer un exemple connu à ce fu- 
jet, capable de faire détefter à 
jamais la pratique pernicieufe 


DU SANG HUMAIN. I 4 I 
de la faignée ; j'ai quatorze 
exemples à-peu-près de même 
nature de celui que je vais ci¬ 
ter , je choifis quelqu’un de 
nom, afin que tout le monde 
foit à portée de s’éclaircir du 
fait. 

M. de Lanoue, Lieutenant 
Général de Meaux, rendit, par 
le vomiiïement après une fài- 
gnée, précédée cependant de 
huit jours de diète, des mor¬ 
ceaux de viande en nature, & 
mourut de cette indigeflion, 
que la faignée venoit de faire 
empirer : il expira prefque fur 
le coup, car ce fut deux heures 
après l’ouverture de la veine. 

Si huit jours de diète ne fùf- 
fifent pas au Médecin pour s’af 
furer que le malade n’a pas d’in- 
digeftion, dans quel cas, quel¬ 
que preiïe qu’il paroiffe, pourra- 
t-on hafarder une faignée ? 


142 Le Conservateur 

La faignée produit bien d’au¬ 
tres maux, elle retarde les cri- 
fes en afFoibliïïant le malade , 
elle les empêche même fouvent, 
en évaporant le feu falutaire qui 
peut les produire, & prive de la 
vie ce pauvre malade, viétime 
innocente de fa confiance en un 
Médecin peu éclairé. 

Le fàng, ce baume divin, 
ce tréfor de la vie, eft à nos 
corps ce qu’efl l’huile à la lam¬ 
pe ; c’eft par fon feu vivifiant 
que notre refpiration demeure 
libre : de-là vient que les mala¬ 
des qu’on a beaucoup làigné, 
font plutôt efîouffiés & devien¬ 
nent facilement afthmatiques. 

Pourquoi fommes - nous les 
fèuls dans le genre animal dont 
on ne puilfe déterminer le cours 
naturel de la vie ? Un chien vit 
quinze à dix-huit ans, un cheval 
environ quarante : chaque ani- 


DU SANG HUMAIN. 14$ 
mal, excepté l’homme, conduit 
allez naturellement là carrière à 
Ton terme. N’en loyons point 
étonnés, les animaux ne fe fei¬ 
gnent pas, leurs remedes font 
la diète & l'eau : leur Médecin, 
la modération. Ils fuivent en 
cela la nature , pourquoi la 
croyons-nous mauvaile mere ? 
cette répugnance naturelle en 
nous de voir notre làng, ne 
veut-elle rien dire ? 

, 73 ' 

Les payfans fe guérijjent eux - 
mêmes de toutes Jortes de ma¬ 
ladies , fans la faignée. 

Si la faignée_pouvoit palier 
pour un bôn remede, pourquoi 
les peuples, auxquels il eft in¬ 
connu , vivent-ils plus heureulè* 
ment en lànté & plus long-tems f 
pourquoi Ibnt-ils , pour ainli di- 



144 Le Conservateur. 
re, obligés d’affbmmer les vieil¬ 
lards comme à la Chine, au Ja¬ 
pon , &e. Pourquoi ce payfan, 
même dans nos climats, fepafTe- 
t-il fouvent de Médecin dans fes 
maladies avec du vin, du lucre, 
de bons bouillons, & le guérit- 
il plus promptement qu un ri¬ 
chard, au milieu de deux ou 
trois Médecins qui le faignent, 
le purgent & le font jeûner à la 
fuite de cela, ce qui éternilè fes 
maladies, par la ruine totale de 
Ion tempérament? 

J’ai déjà dit que les partilàns 
de la faignée, lùr la citation 
qu’on leur fait du Japon ou elle 
eft inconnue, fe retranchoient 
fur la différence du climat. 

Je demande , fi Ton prend 
pour un même climat la Flan¬ 
dre & l’Efpagne ; la Flandre eft 
froide , l’Efpagne eft un pays 
chaud, ri y laigne-t-on pas égale* 
menti 


DU SANG HUMAIN* 
ment ? Sans fortir de France » 
l’Allemagne & la Provence font- 
elles également tempérées ? N’y 
regarde-t-on pas des deux côtés 
la faignée comme un remede 
admirable, indifpenfable même 
dans certaines maladies ? 

Lifons i’hiltoire, nous ver¬ 
rons combien nos peres vivoient 
plus que nous, avant cette pra¬ 
tique cruelle de la faignée. 

Mais, me dira-t-on, « la na- 
» ture dégénéré chaque jour ; 
» nous ne fommes plus ce que 
» nous étions. » 

Sans doute, & nous irons 
toujours de mal en pire, fi des 
Chirurgiens, qui nefçavent pas 
parler, & qui ne fçavent qu’ou¬ 
vrir la veine , continuent a faire 
fortune. Mais venons au fait. 

0 


G 



14.6 Le Conservateur 
74 ’ 

Mal-à~propos s*appuyé-t-on de ta 
dégénèration de l'homme , en 
remarquant qui il vit moins 
vieux que [es peres . 

L’homme ne peut dégénérer, 
en voici la raifbn ; le feu qui l’a¬ 
nime en nailTant eft toujours le 
même : d’ailleurs ne voyons- 
nous pas la femme la plus déli¬ 
cate & rhomme le plus foible 
produire les enfans les plus forts» 
loin de dégénérer, voila au con¬ 
traire un exemple d améliora¬ 
tion ; en effet le feu eft toujours 
feu, il ne peut être impur. 

Que l’on allume un énorme 
monceau de charbon avec la 
plus foible lumière, une étin¬ 
celle mourante, fi vous voulez, 
deux heures après ne formera- 
t’il pas un brafier tout auffi con- 


DU SANG HUMAIN. 14? 
fidérable, que fi vous l’eulfièz 
allumé tout d’un coup avec une 
torche de feu ? Voila l’hifloire 
de la génération : l’homme le 
plus délicat fournit alfez de feu 
pour la génération, & la rend 
aufii sûre en s’accouplant, que 
l’homme beaucoup plus fort. 

Mais fi pendant que le char¬ 
bon s’allume d’un côté, vous 
ôtez une partie de fa matière, il 
ne durera pas fi longtems que le 
monceau voifin du même vo¬ 
lume également embraie , 8 £ 
dont on fe fera contente d’ap- 
paifer le grand feu avec quel¬ 
que féaux d*eau, & paççe que 
le premier monceau de charbon 
ne durera pas autant que. le fé¬ 
cond auquel vous n’avez rien 
ôté, direz-vous que la nature 
du bois de ce premier charbon 
avoit dégénéré ? Cela ne vous 
éclaire-t-il pas fur la prétendue 



148 Le Conservateur. 

dégénération de l’efpéce W 
maine ? 

Nous naiflons avec tout cg 
quil faut pour vivre longtems, 
3c tout aulïi longtems que nos 
peres; mais la prodigalité de 
notre làng nous conduit au tom¬ 
beau quelquefois tout de fub 
te, louvent inlènliblement ; ce 
n’eft pas la faute de la nature , 
rnais purement la nôtre. 

Depuis longtems fai com- 
ipëneé ce Traité > délirant lui 
donner l’étendue nécelTaire, 
pour ne lailfer aucune çhofe à 
délirer au leéteur 5 , fur une ma¬ 
tière aulïi importante. Je pn> 
pofe ma thèfe à tout le mondé ; 
8 c ! après i avoir fatisfait aux ob- 
jeéfcions quon me propofe, je 
les rapporte dans ce Traité, 


DU SANG HUMAIN. 14^ 

7 $• 

Objection féduifantë ctun Médfr 
cin reppectable > en faveur de 
la faignée. 

Un Médecin que j honore 9 
& refpedtable à tous égards , 
me difoitun jour, fans doute 
pour m’embarrafïer : c< Nous 
» avons quelquefois trop de 
» fkng, puifque la nature i’é- 
» vacue dans tel ou tel flijet par 
» les hémorrhoïdes ou le laigne- 
:» ment de nez. » 

Voila, lui répondis-je, une 
obje&ion bien féduifantë ; mais 
examinons à fond la queftion, 
je trouve quelle en vaut la 
peine. 

Obfèrvons d’abord que ce 
particulier qui vient de faigner 
du nez, n’a répandu goutte à 
goutte qu’un demi - verre de 

G iij 



fifo Le Conservateur 
fang, ce qui peut faire trois on¬ 
ces environ : là nature a trouvé 
çéttë évacuation fuffifante pour 
alléger fon fujet : quelle pro» 
portion trouvez-vous, entre cette 
forte d’évacuation & celle d’en¬ 
viron deux livres que mon Chi¬ 
rurgien me tire en une feule 
fois ? Ajoutons encore à cela que 
dans le même jour on en tire 
'quelquefois' fept ou huit livrés 
au malade en quatre ou cinq 
fois. Eft-ce ainfî que nous imi¬ 
tons la nature ? 

Si vous voulez imiter la na- 
ture & la fuivre dans les opé¬ 
rations , ne la précédez donc 
pas d’une diftance auffi for¬ 
te ; d’ailleurs en regardant le 
faignement de nez comme une 
évacuation naturelle , êtes-vous 
bien sûr que ce fujet n’a pas 
donné lieu à cette opération en 
pternuanü , en ramaffant un 



DÛ SAN <3 Hl/MAIN ifï 
poids un peu trop fort, enfin en 
faifànt tel ou tel adfce de force, 
8t qu’il ne fe fait pas Cafle de 
petits vaifleaux capables de don¬ 
ner lieu à cet accident f 
Quant au flux hémorrhoidal, il 
n’arrive guères avant vingt-cinq 
ou trente ans, on ne laide pas 
de faigner les fujets â'iteut âge 
Sc même dés l’enfance. 

7<f‘ 

La fource des maladies riefi ja¬ 
mais dans le Jang } mais bien 
dans les humeurs. 

Je ne fçaurois aflez le répé¬ 
ter, la fource des maladies quel¬ 
conques eft dans TépaiflifTe- 
ment, ou la furabondance de 
telle ou telle humeur, qui, ne 
pouvant filtrer par les conduits 
marqués par la nature, relie 
nomme mêlée avec le fang, 
G iv 



f i $2 Le Conservateur 
quoiqu’elle ne faïïe en effet 
qu’empêcher fon paffage & re¬ 
tarder fon cours. 

La fcience du Médecin con- 
ilflera fans doute à connoitrë 
l’humeur peccante du malade ; 
enfuite il travaillera à l’évacuer : 
voila le grand art de la Méde¬ 
cine. Quand il y a plénitude, dé¬ 
bouchez le grand canal, vous 
donnerez de l’aifance & du jeu 
à tous les petits vaiffeaux qui 
viennent s’y rendre. 

' . 77 * '• 

Pour -purifier le fan g d’un, hom¬ 
me par la. faignée , il faudroit 
le tirer tout , puifqiiune Jeule 
goutte de mauvais peut gâter 
tout le nouveau. 

Je crois avoir fuffifamment 
démontré combien les partions 
de là faignée mettent d’ençête- 


DU SANG HUMAIN. 1 j'J 
ment dans leurs principes. Je 
vais faire une derniere objection 
à ceux qui prétendent pouvoir 
affurer que le fang peut fe cor¬ 
rompre dans nos veines, & en 
fécond lieu qu’il fe paille réta¬ 
blir par la faignée. 

je demanderai donc â celui 
qui penfe quelque cbofe d’aufli 
contraire au bons fens, s’il ne 
faudroit pas finir par ne me 
pas laifler une goutte de Tan g 
dans les veines pour parvenir a 
le purifier , puifque s’il reftoit 
feulement une goutte de iang 

t âté, cette goutte pourroit filt¬ 
re pour infeéfer tout celui que 
je pourrois renouvelier. On voit 
un exemple de cette gradation 
dans l’inoculation de la petite 
vérole , puifqu’un grain de cette 
humeur impure fe multiplie 
attire un nombre infini de pufi- 
tôles à fa refiemblance à la fur- 
Gv 



ifé Le Conservateur 

face de la peau dans un clin 
d’œil ; il s’en faut bien que je re¬ 
garde l’inoculation comme 
auflî falutaire qu’on la foutient. 
Je crois au contraire que l’on 
ne fait pas mal de retarder de 
plus en plus le moment d’éprou¬ 
ver cette cruelle maladie. 

Je crois donc avoir aflez prou¬ 
vé que nos maladies font dans 
les humeurs & jamais dans le 
fang ,‘qui n’eft que leur extrait ; 
le grand point eft de découvrir 
l’humeur dominante d’un ma¬ 
lade. J’ai trouvé dans la décom- 
poiition de l’urine , des moyens 
sûrs d’y parvenir, & j’ofe dire 
que je ne me fuis point encore 
trompé fur l’humeur peccante 
de mon malade ; il m’efl même 
arrivé ïbuvent de dire les moin¬ 
dres accidens d’un malade, l’é¬ 
tat de fon poulx, la couleur de 
ibn vilage, fa-force & fon tempé- 



DU SANG HUMAIN. I ff 
rament, fur la fimpie infpeélion 
de l’urine, & le malade étant 
quelquefois à cent lieues de moi. 

78. 

JJ urine efl un moyen sûr de con¬ 
naître £ humeur dominante J un 
malade , point ejjentiel. 

Je confèiiîe donc aux Méde¬ 
cins de ne pas autant négliger 
cette partie, qu’ils font cru di¬ 
gne de l’être. Quelques-uns com¬ 
mencent à convenir qu’on y dé¬ 
couvre la caüfe de quelques ma¬ 
ladies : ils feront bien étonnés, 
après un peu d’étude, d’y re~ 
connoître les indices & les eau- 
fes des moindres accidens. 

Nous ne pouvons lire dans les 
corps ; il efl naturel de convenir 
que nous pouvons tirer des in¬ 
ductions de fon état, par la li¬ 
queur qui vient de s’y répandre* 
G vj 



i $6 Le Conservateur 
& d’entraîner de toutes fes par¬ 
ties des impuretés, lesquelles* 
à proportion de leur abondance, 
marquent celles dont le corps 
peut être chargé. 

19 ' 

Hippocrate , Galien êC autres % 

approuvent lexamen des urines. 

Je vais citer les Auteurs qui 
m’ont engagé à faire d’auffî fé- 
rieufès expériences fur les qua¬ 
lités de l’urine des malades, afin 
que l’on voye que j’ai beaucoup 
lu avant d’ofer écrire : com¬ 
mençons par Galien. 

Il confeille aux Médecins de 
confulter les urines fur les ma¬ 
ladies du ventricule, des intef- 
tins de la poitrine, des pou¬ 
mons , des nerfs , de la tête , 
8cc. 

Hippocrate prétend que te 


DU SANG HUMAIN. IfJ 
rine tire fon origine cfe trois 
principales fourcesd’abord de 
tout aliment en particulier, di- 
fant quelle contient partie de 
leur lue ; enfuite il aiture qu’elle 
Ce forme de la partie féreufe des 
humeurs contenues dans les vei¬ 
nes ; & enfin la troifieme fource 
de l’urine * félon lui , eft dans 
l’extrait des corps fujets à fè dif- 
foudre, & Ce fondre, pour ainfl 
dire,corameies mauvaifeschairs? 
la graifle, &c. 

Ifaac ? Hollandois jaCure' que ’ 
Ferme coule des mêmes humeurs„ 
qui compofent le fang, comme 
le petit lait de là coagulation du 
lait; dont il découle dans la for¬ 
mation des fromages : il ajoute 
que l’urine n’efh autre choie que 
la coulure du fang. 

Cette comparaifon eft allez 
de monfgGÛt;; car moins les hu¬ 
meurs font pures, plus Furinè 



fij8 ' Le Conseevatèür- 
eft chargée & mauvaife *. ceci 
me paroit conféquent. 

Bellinus eft perfuadé que le 
fang 8 c le lait font leur opéra¬ 
tion fembîable ; car la férolité 
du lait fe fépare par la fermenta- 
tion du ^moindre levain : de mê¬ 
me notre fang , en pafTant par 
le filtre des reins, fépare de lui: 
fout lefëréux» ou bien ce féreux 
fè précipite par le levain qui fe 
trouve toujours partir de Tefto- 
mac, defcend enfuite dans la 
veffie & fort par le canal des 
urines. 

Villicbius dit que la connoif 
fahce de iurine arnene à celle 
des maladies. Il fe fait , dit-il > 
un cas de confcience d’avertir 
les Médecins de s'appliquer à 
cette étude, 8c là regarde com¬ 
me la partie efTentielle de la 
MédecineV pour la diflmâfcioix 
des maladies. 



BU SANG HUMAIN, ffÿ 
8 o„ 

'Hurine ejl le miroir des maladies 

II eft bien fimple & très-pby- 
îique que Furine étant un extrait 
des humeurs & du lang, elle 
doit annoncer & peindre leur 
état par le lien. Ceux qui m’ont 
fait la grâce de me cenfùlter* 
fçavent que liir la fimple dé-. 
composition de Furine d’un ma¬ 
lade ablènt 5 fai fait l’énuméra¬ 
tion de chacune de les mala¬ 
dies : j’ai pouffé les choies au 
point de rendre compte à quel¬ 
ques-uns des rêves qu’ils avoient 
dû faire. M. le Comte de Bar- 
bazan, homme non fufpeâ:, 
Capitaine de Dragons > Cheva¬ 
lier de S. Louis, en a vû la 
preuve fur lui-même, le pre¬ 
mier jour que j’eus l’avantage 
de le voir : rien de plus fimple 



<*~6o Le Conservateur. 
que cette connoiffance , elle eH 
purement phyfique : je dirai 
plus} c’eft que je ne me fuis 
point encore trompé fur l’hu^ 
meur peccante de mon malade, 
8 c que je n’ai point encore pris 
une maladie pour l’autre, dans 
l’examen que ai fait de tel ou 
tel malade par fan urine : cela 
fèul montre allez combien cette 
eonnoiffance mérite peu d’être 
négligée. 

J’entendois un jour un grave 
Médecin qui difoit d’un ton d’o- 
ri cle : « Charlatanerie que tout 
» cela, chofe impollîble que la 
» découverte d’une maladie par 
3 ) burine ? qui dans trois heures 
» changera trois fois de cou- 
» leur. » 

C’eft ainfî, que prévenu pour 
foi, quand on ignore une chofe ? 
on la croit impoilîble. Combien 
de gens Regardent M. Ç *;**'* 



DU SANG BU M A IN. 1 6i 
Comme un Charlatan ou un Sor~ 
cier l Ce n’eft cependant qu’un 
bon Phyficien. Que fait la cou 
leur de l’urine dans fa decompo- 
lltion ? Etii je trouve le moyen 
d’en féparer chaque humeur, 
me fera-t-il difficile de connoître 
là furabondance & de juger du 
vice de celle du malade, à pro¬ 
portion des impuretés dont je fa 
vois chargée l Je prie donc ceiur 
qui font ou feront plus copiftes 
qu’Auteurs*plus Perroquets que 
Phyftciens 5 de lùfpendre leur 
jugement fur les effets & les 
caufes des matières à eux incon¬ 
nues. 

8ï. 

JLa connoijjance des maladies par 
Furine efi pfyyjiijue. 

Je dirai, pour l’honneur delà 
Phyfîque &de la Ch-ymie, qu en 
employant le lècours de mon 



i 62 Le Conservatêür 

fel féparateur, je me fuis évité 
de prendre, Comme quelques 
Médecins, très - refpe&ables 
d’ailleurs, la poitrine d’un ma¬ 
lade pour fon eftomac : trompé 
que j’aurois été comme ce Mé¬ 
decin , auquel le malade accu¬ 
lant fa maladie, mettoit la main 
entre la poitrine & fon efto¬ 
mac , & difoit qu’il avoit des 
douleurs cruelles d eftomac, 
pendant que c’étoitun catarre 
qui fatiguoit l’os fternum, qui 
termine la poitrine; du côté de 
l’eftomac. 

Je ne prendrai pas non plus 
le fcorbut pour la vérole, quoi' 
que les fymp tomes en foient fi 
reÇemblans à quelques égards, 
8c les remedes û différens, er¬ 
reur qui jette quelquefois les 
malades dans un appauvrifte- 
ment de fang fi grand, qu’il 
n’en revient jamais parfaite- 


DU SANG HUMAIN. 163 
ment. Je ne confondrai pas une 
excoriation de matrice avec de 
fi m pies vapeurs, quoique les 
fimptômes fe relfemblent, enfin 
je ne prendrai point la goutte 
pour une autre maladie, 8 cc. 

Ce riefl pas : allez d avoir dé¬ 
truit la pratique de la faignée, 
je vais indiquer des remedes 
fimples capables d’y fuppléer, 
en fuppofant que le malade ou 
fon Médecin foit a {Taré de l’hu¬ 
meur qu’il doit attaquer en lui. 

- 82. 

Remede à l humeur mèlancoüque» 

Si la mélancolie furabonde, 
faites une déco&ion de deux 
onces de racine de poîipode de 
chêne fur deux pintes d’eau : 
ajoutez deux gros de feî de tar¬ 
tre , fermé dans un nouet de 
linge que vous mettrez dans 



1<?4 Lê Conservateur 
cette liqueur& buvez-en à vo¬ 
tre loif, en continuant ce régi¬ 
me huit ou quinze jours s’il le 
faut ; la viande de mouton eft 
celle que vous choilirez pour 
votre nourriture. 

Afin qu’on ne me taxe pas de 
donner des remedes dont j’i¬ 
gnore les propriétés} j’analyfe» 
rai ceux qu’il m’arrivera d’an¬ 
noncer } & j’en indiquerai les 
vertus. 

■ , * 3 - 

Vertus du Polipoâe • 

Le Polipode le plus eftimé 
croît fur le tronc des vieux chê¬ 
nes ; là feuille rellèmble un peu 
à la feuille de la fougere mâle , il 
faudra choilir fa racine récente, 
bien nourrie, groffe & fe caf- 
fant ailement : oblèrvez de la 
monder de lès filamens avant 
de 1’employer. 



DU SANG HUMAIN. lêf 

Cette racine purge la pituite 
vilqueufe & la bile recuite., elle 
convient plus particulièrement 
aux obflru&ions du foie, du 
mézentère, delaratte ;eft bonne 
pour lefeorbut & les écrouelles, 

Rzmede pour la hile , SC vertus 
du citron. 

Votre malade a-t-il trop de 
bile? Coupez légèrement la 
mince peau jaune de deux ci¬ 
trons dans deux pintes d’eau* 
que vous laifferez infuferà froid 
vingt-quatre heures , que le ma¬ 
lade en boive une pinte en di£ 
férens verres loin des repas; il 
continuera jufqu’à ce que les ac- 
cidens qui l’indilpofent ayent 
eeffé; 

Le citron mangé tout entier 
un contre-poifon pour chai* 



Ï 66 Le Conservateur 

fer toute pelle & venin. La par¬ 
tie extérieure de Ion écorce for-* 
tifie le cœur & le cerveau, diC 
lout la bile épaifTe & la préci¬ 
pité. La partie blanche elt efti* 
mée pour les reins & la veffie, 
on rinfufe à la dofe d’une once 
par pinte de vin blanc, qu’on 
boit par jour entre les repas. On 
compolè, avec la peau jaune du 
citron qu’on infufè à la dolè 
dune livre par pinte de vinaigre 
blanc, une liqueur.qui tempere 
les maladies violentes, calme 
l’ardeur des fièvres malignes, 
tant en le faifant refpirer qu’en 
l’appliquant fur le poignet. 

Remede pour la pituite. 

Eft-ce la pituite qui caufel’in* 
dilpofition du malade ? 

Séchez à l’ombre des écofef 



DU SANG HUMAIN.' 1 6j 
ces d’orange douce, infufez-en 
une livre environ dans une pinte 
de bon vin rouge ; vous ferez 
l’été cette infulion au foleil, 
8 c. l’hyver fur la cheminée : au 
bout de trois jours defféchez vos 
écorces d’orange à l’ombre, 8 t 
votre malade en mâchera à 
jeun chaque jour une petite 
pièce. 

Joignez à ce remede des la- 
vemens d’eau de Ion avec un peu 
de miel mercurial dans lafe- 
ringue : prenez des lavemens de 
cerfeuil infufé, fi vous n’avez 
autre chofe, avec un peu de 
beurre frais. Si le malade a lef- 
tomac bon, qu’il boive pendant 
trois jours à jeun chopine de 
petit lait en trois verres, de de¬ 
mi-heure en demi-heure. 



idS Le Conservateur 

26 . 

V'ertus de lorange. 

L’orange eû humeâante* 
douce, cordiale, & très - rafraî- 
ehiflante -, propre à défaltérer 
un malade & le foulager dans 
les fièvres ordinaires : Ton écorce 
mâchée attire la pituite : fa fleur 
eft céphalique, bonne à l’efto- 
mac 3 hiftériqiie & contraire aux 
vers. 

Voici les moyens fimples & 
faciles que j’ai trouvé d’attaquer 
telle ou telle humeur viciée > 
fans purger les autres humeurs. 

%avemens purgatif doux dans 
{es effets. 

Je vais donner la compofitiori 
d’un lavement purgatif en fa- 
veujr 




DU SANG HUMÀIN. 
veur de ceux qui ne peuvent 
rien boire, que l’on ne peut pur¬ 
ger , ni par le moyen des bols 
& des opiates , & qui répu¬ 
gnent à tout ce qui porte le nom 
de médecine , on pourra très- 
utilement employer ce remede 
dans prefque toutes les mala¬ 
dies , excepté celles qui peuvent 
provenir d’épuifement ; j’en ai 
toujours remarqué d’heureux ef¬ 
fets dans plulieurs maladies dif¬ 
férentes. 

Faites bouillir trois demidèp- 
tiers d’eau, 8c faites infufer une 
poignée de fommités de parié¬ 
taire, autant de mercuriale , 
cinq ou fix racines de chicorée 
fauvage, trente fleurs de vio¬ 
lettes , demi-once de féné mon¬ 
dé, & demi-once de racine de 
polipode : paflez la liqueur 8c 
mettez dans la feringue quatre 
onces de miel. 


H 


r-7° Le Conservateur 
On choifira, pour la compo- 
fition de ce remede, les herbes 
aufîi fraîches qu’il fera poffîble 
de les avoir. 

Comme l’hyver,fur-tout, il y 
aura des tems où l’on n’aura pas 
commodément toutes les herbes 
fraîches, il faudra, li vous les 
employez féehes, obferver au 
moins quelles forent de l’année, 
& quelles n’ayent feché ni au 
foleii ni à la cave. 

Il faudra choilir votre féné, 
car il n’en ell que trop dans les 
boutiques qu’il ne faut pas em¬ 
ployer, parce qu’il ne vaut rien, 
quelquefois on perd la Con¬ 
fiance que l’on avoit pour tel ou 
tel remede par cette raifon-; 
l’importance du choix des re* 
medes ell fi grande , que la rhu- 
barbe, qui fait un dès meilleurs 
purgatifs dans certaines mala¬ 
dies, devient aftringente lorf 



DU SANG HUMAIN. 1*7f 
quelle eft très-vieille & ver¬ 
moulue. 

Voici donc à quoi vous con- 
noîtrez le meilleur foné , Tes 
gouffes ou follicules qui contiem 
nent fes graines , doivent être 
noirâtres, tirant lur le verd; 
elles doivent être un peu ame- 
res & tant foit peu âpres au 
goût ; leur fomence doit être 
prefTée dans Ion écolfe & bien 
nourrie : les plus mauvaifes de 
toutes font celles qu’on a pu 
cueillir avant d’être mûres, elles 
font blanchâtres. 

On n’employ e que les feuilles 
dans le lavement que je viens 
d’indiquer, les meilleures font 
verdâtres ; il faut, pour être 
bonnes, quelles n’ayent point 
une odeur défagréable, que fes 
feuilles foient verdâtres, étroi¬ 
tes, douces fous les doigts & 
bien pointues, ce font celles qui 


'ifà Le Conservateur 
reSemblent le plus à ce tableau, 
que l’on appelle feuilles de féné 
du Levant, quoiqu’elles ne vien* 
nent pas toujours de fi loin, 

; . . 88 . 

Propriétés du. féné, félon on%$ 
riiiteurs anciens SC modernes ., 

. Gaibert,- ancien Doéfceur de 
là'Faeulté de Paris» dit dans fes 
ouvragés que-le féné bien choifi 
fait tin'excellent purgatif, qu’il 
Betéoyë parfaitèment & dans ré» 
volution la première & la fé¬ 
condé région du cœur, fortifie 
Feltomac , le foie , la ratte, le 
cerveau-, &c. 

-M. -GHbmel prétendoit que 
-fépé piirgeoit, comme par 
fympâthie toute humeur pec¬ 
cant:# St# ïüperflue. - 
i Mu Dobë dit que' pour peu 
qu’oh lé mitigeVdoit avec fanis 



£>U S An G MÜMAlIf. jffjjf 
Verd 5 foit avec un foupçon de 
Canelle ou de rîiufcade , il n’ab 
iume jamais les humeurs, 14 ajou¬ 
te que ce purgatif ne peut nuire 
à aucun tempérament.- 

Enfin ? Mefîièurs AétuariuS, 
Serapion 5 Mezué, Jean Fernel, 
Sylvius » Mathiôle, Chomel & 
Tournefort, font chacun un 
éloge particulier du féné. 

Sp. 

Qualités SC vertus de la mer* 
curiale* 

Voici les propriétés de la 
mercuriale , qui entre dans la 
compolition de ce lavement : 
elle eft laxative 3 apéritive, com 
traire aux vapeurs } purge la bile 
Sc les eaux. 


[*74 Le Conservateur 

9 o. 

Vertus de la pariétaire • 

La pariétaire eft une plante 
émolliente, déterfîve , nettoye 
les reins, provoque l’urine, at¬ 
tire les glaires & pouffe les gra¬ 
viers. 

pi. 

Vertus de la racine de chicorée 
fauvage. 

La racine de chicorée fàu- 
vage raffraîchit , incife les glai¬ 
res 9 eft utile au foie & à la ratte* 
qu’elle aide à délopiler. 

9 2 ‘ 

Vertus de la fleur de violettes . 

La fleur de violettes eft très- 
douce , raffraîchit, calme les in- 
teftins » eft propre aux nerfs, 


DÜ SANG HUMAIN* Jff 
elle ell onëtaeufe & fait dormir* 
On peut employer de lave¬ 
ment dans tous les das où l’on 
veut débarralTer lès premières 
voies ; on peut appeller ee re- 
medes, de précaution, parce 
qu’il prépare très-bien aux '.au¬ 
tres convenables à fhumépr 
peccante du malade, 8c qu’il 
commence toujours par donner 
un peu de calme, en diminuant 
la fermentation qui caufe le dé-* 
fordre des humeurs. 

93' 

Remarques intéreffantes fur les 
ions effets de ce lavement. 

Ce que j ai remarqué de plus 
intéreflant dans ce remede, c eft 
que je l’ai employé, en faveur de 
malades dans, tous les cas , fem¬ 
mes groïïes même, auxquelles il 
n’eft point contraire : il foulage 
H iv 


’iyrf Le Conservateur 
les indigeftions, coupe les fiè¬ 
vres quand on le répété à pro¬ 
pos , un peu avant la violence 
de l’accès : il eft propre aux ré¬ 
tentions d’urine, aux révolu¬ 
tions de bile & à les déborde- 
mens. 

On oblèrvera de fe compor¬ 
ter, dans Mage de ce purgatif, 
comme dans' tout autre ,c eft-à* 
dire, de boire à chaque folle une 
tifane félon fa maladie, & de 
boire un bon bouillon gras deux 
heures après, tems auquel il au¬ 
ra fait fon efiet ; ôn pourra donc 
dîner ou .louper, s’il eft rendu 
avant les heures du repas. ■ 

On conviendra que quand il 
fera queftion de maladies de 
plénitude , ce remede fera tou¬ 
jours préférable^ la faignée, Sc 
que les gens en fanté, qui fe 
font habitués .fortement à faire 
des remedes de précaution, pour- 


DU SANG HUMAIN. Ï 77 
ïônt employer celui-ci à la place 
d’une faignée, qu’ils avoient 
coutume de fe faire faire. 

Avant de finir ce Traité, je 
veux raconter ce qui m’arriva il 
y a deux ans environ, cela fèr- 
vira à confirmer l’opinion où je 
luis ? que chaque faignée fait 
toujours du mal > quelque bien, 
quelle femble faire. 

Un homme d’environ qua¬ 
rante ans 3 d’une belle figure 7 
robufle en apparence , aITez gras 
mais un peu pâle > me dit : « Mon- 
» fieur, personne n’a plus été fai- 
» gné que moi, je l’ai été il y a 
» dix ans cinq fois dans un jour, 
» je ne l’ai pas été depuis , & 
» vous voyez que je me porte 
» allez, bien ». 

Je lui répondis qu’il avait rai- 
fon ; mais j’ajoutai que cela n’a- 
voit pû fe faire fans diminuer un 
peu la force de l’humide radical * 
H v 



17S Le Conservateur 
bafè des bonnes digeltions; iî 
m avoua en effet qu’il avoit de 
tems en tems de fortes douleurs 
d’eftomac après fes repas : voici 
la comparaifon que je lui fis , 
d’un homme que l’on guérit 
d’une inflammation par la fai- 
gnée j & d’un fécond malade 
que l’on guérit par d’autres re- 
medes qui appaifènt le feu. 

Un particulier l’hyver auprès 
de fon feu, trouve qu’il eft trop 
âpre, & pour fe chauffer d’une 
chaleur plus douce, il fait jetter 
la moitié des tifons embrafës par 
la fenêtre. 

Un autre dans le même cas fé 
contente de jetter a fiez d’eau fur 
fon feu pour n’éprouver qu’une 
chaleur aufîi tempérée qu’il la 
défire, &. tout-à-fâit femblable 
au degré de celle du premier 
particulier. 

Quoique ces deux perfonnes 


DU SANG HUMAIN, IJÇ 
ayent également réulïi tous les 
deux dans l’intention de modé¬ 
rer leur feu , il s’enfuivra que 
Fun le pourra chauffer plus long- 
tems que l’autre, parce qu’il n a 
fait que raffraîehir fen feu, au 
lieu que l’autre l’a jetté par la fe¬ 
nêtre ; je conclus en lui difant : 
A chaque faignée que vous avez 
fait, vous avez jette la matière 
du feu par la fenêtre& celui 
que l’on auroit calmé par des re- 
medes propres a confervé les 
matières du lien, & devra,- fé¬ 
lon moi j vivre plus long-tems 
que vous. Il me dit que tout cela 
étoit à merveille * qu’il fé portait 
fort bien , & qu’il auroit cent 
fluxions de poitrine, qu’il ne les 
feroit point traiter fans faignée. 
Six mois après, j’appris que co 
pauvre diable étoit mort d’une 
mort que l’on a regardée comme 
fubite, & qui pouvoit avoir la 
H vj 


i8o .Le Conservateur 
fource dans la privation de la 
rnatiere du feu nécefTaire à la 
vie & à la digeltion. ; 

S>4- 

Comparaifon de nos humeurs SC 
du fangi avec les lampes dé- 
glije garnies deau SC dhuile* 

Je compare nos humeurs & 
notre fàng dans nos corps / aux 
lampes d’églifè garnies d’eau & 
d’huile : je flippofe l’une de ces 
lampes trop pleines, de maniéré 
que l’huile femble prête à étouf¬ 
fer la mèche ; il n’ell pas dou-, 
teux qu’on rendra la fplendeur à 
4a mèche de cette lampe allu¬ 
mée , en lui ôtant une cuillerée 
de l’huile qui femble prête à la 
fuffoquer : voila l’exemple du 
fbuldgement que reçoit un hom¬ 
me de la fàignée, qu’il fe fait 
faire dans une pléthores & quand 


D-ü SANG H U M'A T N. i&t 
le fàng lui porte à la tête. 

Jefuppofe une fécondé lampe 
dans le même cas, & que pour 
dégager la mèche on fe foit con¬ 
tenté d’ôter une partie de l’eau; 
du fond de la lampe, qui ne s’y 
trouve placée que pour fqutenir: 
l’huile, il arrivera une égale 
réuflite de cette opération, par 
rapport à la mèche devenue 
plus libre, parce qu’en dimi¬ 
nuant l’eau inférieure à l 4 huile ^ 
celle-ci s’eft un peu abaifTée ; 
voila l’exemple ou la comparai- 
fon convenable à celui qui, pour 
fe dégager les vaifTeaux,. le fera. 
contenté d’employer un lave¬ 
ment purgatif*, lequel , en déga¬ 
geant les matières inférieures, 
aura produit l’affaiirement de 
celles qui repofoient fur elles \ 
enfin qui n’aura purgé que les 
matières impures, de la fermen¬ 
tation delquelles étoit produite 


r ï$2 Le CoNSEftV&TEÛR 
la grande tenfion de lès veines 
& de tous fes vailTeaux. 

Notre fàng eft l’iiuile, nos 
humeurs font i’eau de la lampe 
qui brûle en nous : en fuppofant 
que la faignee put produire lé 
même bien qu r ùn lavement pur» 

f atifj un délayant,' un abfor- 
ant ou autre remede limple > 
il s’enfuivra que moi qui nai 
purgé que des matières cralTes, 
je nai pas dû abréger par ces re» 
medes les jours de mon malade > 
au lieu que vous, en lui tirant le 
fan g dans lequel réfide le baume 
& le principe de la vie, enfin 
Fhuile de la lampe , vous avez 
du reftreindre le cours naturel 
de Ion exiftence, de maniéré 
que cet homme conftitué pour 
vivre cent ans & plus,n’en vi¬ 
vra pas feulement cinquante s’il 
a été beaucoup làigné. Nous ne 
ferions pas aufiï étonnés de voir 


du sang humain. rS$ 
dans nos familles des vieillards 
de cent ans, fi l’ufage des li¬ 
gnées', prefqu’univerfellement 
reçu, ne rendoit la chofe pref~ 
qu’impoflîble. 

5>r- 

M. Confiant y mort à 114 ans ? 
n avait jamais été faigné. 

Tout Paris Içait que Mon- 
fieur Confiant, mort il y a deux 
ou trois ans à cent quatorze 
ans, n’avoit jamais été fàigné: il 
avoit eu durant fa vie beaucoup 
de fièvres inflammatoires, mais 
il s’étoit guéri par les remedes 
Amples ; il employoit les abfcr- 
bans » les délayans & les pur¬ 
gatifs. 

Nous avons, dans les diffé-* 
rens Journaux,depuis long-tems.» 
des notes de vieillards morts à 
plus de cent ans ; que i’on en dé- 


ï §4 Le Conservateur 5 Sec. 
découvre feulement un dans h 
nombre qui ait été beaucoup 
fàigné, je ferai fatisfait. 

5>* 

Forte objection contre la Jaignie* 

Ce dernier défi que je fais- à 
l’Univers, fèrvira à prouver cfe 
plus en plus mon fentiment fur 
la faignée. 

Que l’on me repréfente un 
vieillard de plus de cent ans, 
que Ion ait beaucoup faigné 
dans fes maladies, je païïè con¬ 
damnation ; mais je puis afilirer 
que dans toutes les recherches 
que j’ai faites par-tout depuis dis 
ans, je n’en ai pas encore trouvé 
un feuL 


FI Æ 


T'A B-L E 

DES SOMMAIRES 

Contenus dans ce Volume»- 

si. X ^ Saignée efl toujours pré - 
B / judiciable , quelque bien, 
qu ellefernble faire. page i 

2. Ze fart g fe purifie avant d'en- 
trer dans les veines. 3 

5 A. Analyfe du fan g SC de fis 
principes. 4. 

3 B. Ce ^«e cefl que la bile . 5“ 

4. Ce que défi que la pituite . 7 

5. Ce que défi que la mélancolie 

ou flegme., & 

6. Moyen de- connoitre thumeur 
peccante du malade. Nous al - 










!i8rf TABLE 
Ions tindiquer. Domination 
du fan g. io 

7. Domination de la hile. 11 

8. Domination de la mélanco¬ 
lie ibid. 

p. Domination de la pituite. 12 
10. Nos humeurs empirent plus ou 
moins félon tes faifons. 15 
tl. Empire du fang au prin¬ 
temps . ibid. 

12. Empire de la hile en été. 14 

13. Empire de la pituite en hy- 

ver . ibid. 

14. Diflinclion de îhumeur qui 
caufe telle ou telle fièvre. 1 6 

33. datife de la fièvre continue « 

ibid, 

16. Fièvre tierce, 17 

17. Fièvre quarte . ibid, 

18. Fièvre quotidienne. 18 

ip. Raifons qui prouvent que ta 

faignèe la plus prudemment or¬ 
donnée ejl toujours un mal, 20 
zo.Za faignèe contraire meme 


DES SOMMAIRES. 187 

dans la pléthore. 21 

Si. Attention particulière de Ga¬ 
lien avant de faire faigner 9 
quoique ce fut un des partifans 
de la faignée. 25 

122. Second cas où la faignée e/l 
contraire y même dans la plé¬ 
thore. 27 

23. La nature efl en défaut fi lé* 

vacuation du fan g efl un de 
fes ouvrages. ibid. 

24. Principes defquels le f 'ang fl 

formé. 27 

23. Raifons féduifantes en faveur 
de la faignée. 2p 

2.6. Développement de la digef- 
tion. 30 

27. Ce qiùil faut pour bien di¬ 
gérer. 32 

28. La falive efl le diffolvant de 

(eflomac. 33 

2 p. Aucun corps ne fe di/fout que 
par un diffolvant de fd. natu¬ 
re. 3.S 



m TABLE 

30- Raifons qui prouvent que ion* 
tes nos maladies viennent du 
feul défaut de digeflion. 41 

31. Comparaifon de la bile en 

nous , avec le foufre dans le 
globe ierreflre. 44 

32. Trois expériences qui prou¬ 

vent que l'analogie des corps efi 
nécejjâire à leur mélange par* 
fait. .48 

3 3. Réponfes a quatre objeclions' 
féduifantes en faveur de la fair 
gnée. 5° 

34. Preuves de tinutilité de la 
faignée. , 

35'. La faignée rejettée dans les 
fluxions de poitrine . 59 

3 < 5 . La faignée contraire dans la 
plénitude. & 1 

37. O/z femblefaire de la faignée 
un remede univerfel. 6$ 

38. Eckauffans qui rafraichïf 

fent. 67 

39. La faignée contraire dans les 


DES SOMMAIRES, i8p 

maladies habituelles . 69 

40. La vie ejl dans le fang. 70 

41. La faignée contraire dans 

l opprejjLon. 7 î 

42. La Jaignée inutile dans les 

fuppreffions . 75 

La faignée contraire dans 
certaines apoplexies, 74. 

44. Les délayans SC les purgatifs 
font fort au-dejftis de la Jài *» 
gnéc, f 77 

45-. Quarante-huit differentes ob - 
fervations de Laurent Schol- 
\fuis 9 Médecin fameux, avant 
d'en venir à la faignée. 78 
'4<5. üfo Médecin conjifle à 
découvrir P humeur peccante. 87 
4-7. Chaque faignée 'doit avancer 
• le terme _de nos jours. §9 
4.8. La faignée eft contraire même 
aux objlruclions , quoiqu'elle 
femhle utile. 91. 

49. Développement des çaufes qui 
rendent la faignée mortelle dans 


*po TABLE 

une indigeflion . ^ 

JO. La faignée corrompt le fang 
en dijjipant fes efprits. pj. 

J i. Comparaifon du partifan de 
la faignée SC du couvreur fur 
un toit . p 5 

J 2. Exemple de Vinutilité de la 
faignée même dans iapoplexie. 

99 

J J. Raifon de préférer certains 
remedes doux à la faignée . loi 
La faignée nejl nécejfairt 
dans aucune maladie , puif que 
Ion a des exemples de chaque 
maladie en détail guéries fans 
fon fecours . ioj 

jj. 0/2 ne faignera jamais fans 
Jexpofer à rencontrer une in- 
digeflion, raif on de plus pour 
rejetter la faignée dans tous les 
cas. 104 

5 6. Trois exemples qui prouvent 
que la faignée épaijfît les hu¬ 
meurs j 6 C devient par là. la 


DES SOMMAIRES, ipi 

four ce de £aveuglement } quand 
elle ne caufe pas des accidens 
plus graves, 107 

f'j. Lafaignée produit la para- 
lyfie SC bien d autres maladies. 

ni 

5 S. Sentiment du grand Dumou¬ 
lin , fur le traitement général 
des maladies. 113 

$$. Ne pas confondre la diète SC 
le jeune. 114 

60. Diminuer éC choifir les ali¬ 

ment d’un malade 9 ejl ce que 
f appelle diète, 118 

61. Singulier abus que lesfem¬ 
mes font de la fàignée. 119 

62. Effet pernicieux de la faignée 

: que Von fait à deffein de dimi¬ 
nuer une inflammation. 121 

63. Le fang contient en lui le 

principe de vie. 123 

64. Erreur de ceux qui croyent 
que le foie forme du fang affe^ 
pur pour fupplèer à Vévacua- 


Ï22 TABLÉ 

don de la faignée. 124 
6 S m Lafaignée ne fl pas néceffaire 
pour le mal de tête, quoique le 
fang s y porte. 12; 

66. Un mauvais éflomac produit 
fouvent des maux de tète . 127 
éj. Lafaignée contraire à la fin - 
Xion de poitrine. 129 

68. Les lavemens > les délàyans , 
les purgatifs SC la tranfpira¬ 
tions font les remedes fùpê- 
rieurs . 130 

69.. La faignée contraire au mal 
de tête s SC peut le donner\ 132 

70. Notre fang ne peut fe cor¬ 
rompre pendant notre vie. 134 

71. La Chine SC le Japon font les 

pays les plus peuplés , où ion 
vive-moins fùfet aux maladies y 
SC plus vieux . La faignée y 
efl inconnue. 138 

72. Aucun Médecin y partifan de 
la faignée s ne peut donner de 

- raifon fùfflfante pour s'affûter 
quil 


DES SOMMAIRES. ip$ 

quil nia pas mis tel ou tel ma* 
lade en danger de mort. 140 

73. Les payfansfe guériffent eux- 
mèmes de toutes fortes de ma¬ 
ladies , fans la faignée. 143, 

74. Mal-à-propos s appuyé-1-on 
de la dégènération de t homme y 

, en remarquant qu il vit moins 
vieux que f es per es. 14 d». 

75*. ObjeÈionfèduifante et un Mé¬ 
decin refpeâable, en faveur de 
la faignée. 149 

7 6 . Là f duree des maladies neji 

jamais dans le fang , mais bien 
dans les humeurs. î fi 

77. Pour purifier le fang dun 
homme par la faignée, il f en¬ 
droit le tirer tout , puifquune 

feule goutte de mauvais peut 
gâter tout le nouveau. ifz 

78. L'urine e/l un moyen sûr de 

J connoitre t humeur dominante 

d’un malade, point efentiel. i££ 

7 fi Hippocpate , Galien SC au- 


ip* TABLE 

très , approuvent P examen des 
urines. 1^5 

80. Vurine efl le miroir des mala¬ 
dies, 

81. La connoijjance des maladies 
par l'urine efl phvyjique. 161 

82. Remede à P humeur mélanco¬ 
lique. i (5 j 

83. Vertus du Polipode . 164 

8f. Remede pour la bile , SC ver¬ 
tus du citron. 16$ 

8 3. Remede pour la pituite. 1 66 

86. Vertus de l'orange. 16% 

87. Lavement purgatif doux dans 

fes effets. ibîd. 

88. Propriétés du féné ? félon 

on^é Auteurs anciens SC mo¬ 
dernes. 172 

8 p. Qualités SC vertus de là mer¬ 
curiale. 17$ 

po. Vertus de la pariétaire. 174 
p i. Vertus de la racine de chicorée 
faùvàge. ibîd. 

p 2, la fleurs de violettes » 

ibîd. 


DES SOMMAIRES. 1 $i 
g, Remarques intéreffantes fur 
les ions effets de ce lavement. 

■ 7 ? 

54. Comparaifon de nos humeurs 
SC du fang, avec les lampes 
dïèglife garnies rieau SC ri huile* 

^y. M. Confiant, mort a i 14 ans, 
riavait jamais ètèfaigné. iS| 
ÿ6. Forte objection contre la J ai? 
gnée, 


Fin dé la Table» 


APPROBATION. 


J ’Ai lu par ordre de Monfeigneur le 
Vice - Chancelier v un Manufcrit 
qui a pour titre Le Confervateur du 
fang humain , ou la Saignée démontrée 
toujours pernicieuje & fouvent mor¬ 
telle. Ce petit ouvrage renferme un fyf- 
tême qui combat l’ufage de la faignée 
reçu, dans la pratique de Médecine : 
gomme il eft fufceptible d’interpréta¬ 
tion , & que d-ailleurs les nouvelles 
opinions tendent à la perfection des 
connoiffances 9 j’ai' crû qu’on en pou- 
voit permettre fimpreflxon. A Paris ce 
2,8 Novembre 1765. 

Signé, POUSSE. 
PRIVILEGE DU ROI . 

T O UI S , par la grâce de Dieu, Roi de 
1 j France & de Navarre : A nos amés & 
féaux Confeillers , les gens tenans nos Cours 
de Parlement. Maîtres des Requêtes ordinai¬ 
res de notre Hôtel, Grand Confeil, Prévôt 
de Paris, Baillifs, Sénéchaux, leurs Lieute- 



hans civils, & antres nos Tuftieiers qu’il ap¬ 
partiendra : S a l o t. Notre amé le fieur de 
.Malon, Nous a faitexpofer qu’il défireroit 
faire imprimer & donner au public un Ou¬ 
vrage qui a pour titré Le Cànfervateur du 
Jang humain , ou la Saignée démontrée quel¬ 
quefois pernicieufe 6» fouvent mortelle , s’il 
Nous plaifoit lui accorder nos Lettres, de Pri¬ 
vilège pour ce nécelïaîre. A ce s; causes, 
voulant favorablement traiter ledit Expofant, 
Nous lui avons permis & permettons par ces 
Préfentes,, de faire imprimer ledit Ouvrage 
autant de fois-que bon lui femblera& de le 
faire vendre & débiter par tout notre Royau¬ 
me , pendant le temps de dix années confécu- 
tives, à compter du jour de la date des Pré¬ 
fentes : Faifons défenfes à tous Imprimeurs , 
Libraires & autres perfonnes de quelque qua¬ 
lité ou condition qu’elles foieat, d’en intro¬ 
duire d’imprelfion étrangère dans aucun lieu de 
notre obéiflance : comme auffi de faire impri¬ 
mer , vendre, faire vendre, débiter ni con¬ 
trefaire ledit Ouvrage , ni d’en faire aucun 
extrait, fous quelque prétexte que ce puilfe 
être , fans la permiffion exprefle & par écrit 
dudit Expofant, ou de ceux qui auront droit 
de lui , à peine de confifcation des exemplai- 
rfcs contrefaits, de trois mille livres d’amen¬ 
de contre chacun des contrevenans , dont un 
tiers à Nous , un tiers à l’Hôtel-Dieu de Paris, 
& l’autre tiers audit Expofant, ou à ceux qui 
auront droit de lui, & de tous dépens, dom¬ 
mages & intérêts. A la charge que ces Pré¬ 
fentes feront enregiftrées tout au long fur le 
Regiftre de la Communauté des Imprimeurs 



& Libraires de Paris, dans trois' mois de la 
date d’icelles j que l’impreffion dudit Ouvrage 
fera faite dans notre Royaume & non ailleurs, 
en bon papier & beaux caraéteres, conformét 
ment à la feuille imprimée attachée pour mo- , 
dele fous le contrefcel des Préfentes ; que l’Im-. 
pétrant fe conformera en tout aux Réglemens 
de la Librairie, & notamment à celui du io 
Avril 172.5 -y qu’avant de l’expofer en vente, 
le Manüfcrit qui aura férvi de copie à l’im¬ 
preffion dudit Ouvrage , fera remis dans le 
état ou l’Approbation y aura été donnée , ès 
mains de notre très-cher & féal Chevalier' 
Chancelier' de France, le fleur D e î, a mo 1- 
g n o n j & qu’il en fera enCuite remis deux 
Exemplaires dans notre Bibliothèque publia 
que, un dans celle de notre Château du Louvre, 
un dans celle dudit fleur Delamoignon , & ua 
dans celle de notre très - cher & féal Cheva¬ 
lier , Vice-Chancelier & Garde des Sceaux de 
France , le fleur de’ Maupeou ; le tout à peine 
de nullité'des Préfentes. Du contenu defquei-, 
les Vous mandons & enjoignons de faire jouir 
ledit Expofant, ou fes ayanscaufe, pleine- 
ment & paifiblement, fans fouffrir qu’il leur 
foit fait aucun trouble ou empêchement. Vou¬ 
lons que la Copie des Préfentes , qui fera im¬ 
primée tout au long au commencement 'ou à 
la fin dudit Ouvrage , foit tenue pour duement 
fignifîée , & qu’aux copies collationnées par 
l’un de nos amés & féaux Confeillers Secré¬ 
taires , foi foie ajoutée comme à l’Original. 
Commandons au premier notre Huiffier^ ou 
Sergent fur ce requis , de faire pour l’exécu¬ 
tion d'icelles , tous ades requis & nécefiaires. 


fans demander autre permiffian ; & nonob- 
ftaut Clameur de Haro , Charte Normande, 
& Lettres à ce contraires. Car tel eft notre 
plaifir. Donné à Verfailles, le trente-uniéme 
jour du mois de Décembre, l’an de grâce mil 
fept cent foixante-cinq , & de notre Régné le 
einquante-uniéme. P.ar le Roi enTon Cônfeil, 

' LE BEGUE. 

Regijîrê fur le Regijlre de l/i Chambre Royale 
& Syndicale des Libraires & Imprimeurs de Paris , 
N°. 784. fol. 412.. conformément au. Réglement de 
1725 , qui fait défenfes , article XLI, à toutes per- 
fonnes de quelques qualités & conditions qu'elles 
J,aient, autres que les Libraires & Imprimeurs , de 
vendre, débiter , faire afficher aucuns Livres , pour 
les vendre en leurs noms , fait qu'ils s'en difent tes 
Auteurs ou autrement ; €r â lu charge de fournir à 
la fufdite Chambre neuf exemplaires > prefcrits par 
Part. CP 111. du même Réglement. A Paris ce 4 
Lévrier 17 66. 

LE CLERC, Adjoint.